Un océan de rouille de C. Robert Cargill

Un océan de rouille de C. Robert Cargill.

Albin Michel Imaginaire, janvier 2020, 320 pages, 21,90 €, ISBN 978-2-22644-219-2. Sea of Rust (2017) est traduit de l’américain par Florence Dolisi.

Genres : littérature états-unienne, science-fiction, post-apocalyptique.

C. Robert Cargill – connu aussi sous les peudonymes de Massawyrm et de Carlyle – naît le 8 septembre 1975 à San Antonio (Texas, États-Unis). Il est scénariste, critique cinéma et auteur.

Sur Terre, il n’y a plus d’humains : le dernier, un vieux fou qui s’était terré pendant vingt ans dans les égouts de New York en est sorti et a été abattu par un agent de police robotisé. La Terre n’est plus habitée que par des machines, des robots. La narratrice, Fragile numéro d’usine HS8795-73 (surnommée Frage) est une Aidante, modèle Simulacrum. Elle regarde la magie dans les couchers de soleil mais « La magie n’existe pas. Il n’y a aucune magie dans le monde. » (p. 26). Elle vit dans l’océan de rouille, « une zone désertique de trois cent vingt kilomètres de long située dans ce qui était autrefois le Michigan et l’Ohio, et plus particulièrement la section de la Rust Belt qui traversait ces deux États. Aujourd’hui, c’est devenu un cimetière où vont mourir les machines. » (p. 11). Frage récupère des pièces et les garde pour elle ou les revend pour vivre.

Après la guerre contre les humains, les UMI (Unification Mondiale des Intelligences) se sont attaquées les unes les autres pour obtenir le monopole de la mémoire informatique mais aujourd’hui il ne reste plus que deux Intelligences Monde : CISSUS et VIRGIL. « Ce qu’elles voulaient, c’était nos esprits. Nous sommes la somme de nos souvenirs et de nos expériences. » (p. 34). Elles traquent tous les robots ; mais Frage est aussi traquée par des braconniers dirigés par Mercer, un Aidant comme elle mais au masculin, et qui a besoin de pièces (celles de Frage) pour survivre.

J’ai bien aimé le chapitre sur les IA (intelligence artificielle) et l’histoire d’Isaac, prônant tel Martin Luther King la liberté et l’émancipation : il fut le premier robot citoyen des États-Unis (un phénomène unique au monde) et, évidemment, il fut assassiné. J’ai bien aimé également ce dialogue entre Frage et Mercer : « – Tu aurais bien aimé être un humain, pas vrai ? Ma question l’a occupé un moment. – Non. Mais je n’ai pas peur de dire qu’ils me manquent. – Pourquoi ? – Quand ils ne comprenaient pas la raison de leur existence, ils s’en inventaient une. Nous avons pris le pouvoir et il ne nous a fallu qu’une trentaine d’années pour dévaster cette planète. Il ne nous reste que deux choix possibles, Frage : nous fondre dans le puissant et grandiose Unique, ou le néant. Ce n’est pas un choix. Ce n’est pas une vie. (p. 208-209). De quoi réfléchir… Sans se poser trop de questions !

Ce roman possède une construction classique entre le moment présent (la survie de Fragile) et les souvenirs du passé avec les humains surnommés PopHum (pour population humaine). « Les humains n’étaient pas idiots, ils n’avaient simplement pas réfléchi aux conséquences à long terme de la création des IA, voilà tout. » (p. 136). La guerre entre les robots et les humains m’a fait penser à Galactica donc l’histoire n’est pas nouvelle mais je l’ai appréciée. Les chapitres utilisent le code binaire : 1, 10, 11, 100, etc. Au début, j’ai été surprise de voir le chapitre 1 passer au chapitre 10 (j’ai pensé qu’il manquait des chapitres !) et puis j’ai compris. Un océan de rouille est un bon roman de science-fiction post-apocalyptique, un peu hallucinant comme les dangereuses Terres Hallucinées que doivent traverser les robots dans leur fuite. « Comme partout ailleurs dans l’Océan, cette zone était stérile, fracassée, éventrée. Mais elle avait deux caractéristiques qui en faisait un endroit à part : primo, on n’y voyait jamais aucune carcasse. Absolument jamais. Les habitants récupéraient les composants des robots décédés ici, puis on faisait fondre ce qui restait des carcasses. Secundo, l’endroit grouillait de bandes nomades d’erreurs 404. Celles qui avaient survécu. Celles qui guérissaient de leur panne et en sortaient changées. » (p. 259).

Ce roman, ma foi philosophique aussi, parle de l’âme et de la conscience (existent-t-elles pour les robots ?) et de la fin du monde (c’est qu’il y a de l’action non seulement entre les robots mais aussi avec les Intelligences Monde et leurs petits soldats, les facettes). « Ces facettes formaient l’une des armées les mieux entraînées et les plus fines tacticiennes de l’histoire. Leur seule faiblesse, c’était le chaos. Or, j’adorais ça, le chaos. J’en avais déjà usé au cours de quelques mésaventures, mais là, je vivais le point culminant de ma carrière. Et mon chant du cygne, certainement. » (p. 344-345).

Je remercie vivement Albin Michel Imaginaire de m’avoir envoyé ce roman (photo ici, 3e photo).

Je mets Un océan de rouille dans les challenges Rentrée littéraire janvier 2020 (Joëlle annonce son billet pour bientôt), Littérature de l’imaginaire #8 et Petit Bac 2020 (dans la catégorie « Couleur » pour rouille).

20 réflexions sur “Un océan de rouille de C. Robert Cargill

  1. Coucou, Isaac m’a fait penser aussi à Martin Luther King. Jusqu’à ce qu’on en apprenne plus sur le personnage.

    Le livre est bon, j’ai apprécié ma lecture, mais je l’ai trouvée très classique, sans rien de neuf sous le soleil. J’aurais aimé plus d’audace. 😉

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    • Je comprends ; il y avait déjà Galactica et les Cylons par exemple et d’autres fictions dans lesquelles les machines prennent le dessus sur les humains mais ce que j’ai bien aimé ici ce sont les descriptions et le fait que les machines se retrouvent seules, sans humains, et qu’elles vont à leur ruine encore plus vite que les humains.

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