La tour des Anges de Philip Pullman

La tour des Anges de Philip Pullman.

Folio Junior, n° 1052, octobre 2017 (nouvelle édition), 450 pages, 9,30 €, ISBN 978-2-07-509124-4. The Subtle Knife (1997) est traduit de l’anglais par Jean Esch.

Deuxième tome de la trilogie À la croisée des mondes qui m’a été envoyé par Lecteurs.com, merci !

Genres : littérature anglaise, littérature jeunesse, fantastique, science-fiction.

Philip Pullman [je remets ce que j’ai écrit pour Les royaumes du nord] naît le 19 octobre 1946 à Norwich dans le Norfolk en Angleterre. Son père étant pilote de la Royal Air Force, la famille le suit en Afrique (Rhodésie, Zimbabwe…) mais lorsque le père meurt dans un crash d’avion au Kenya en 1954, la mère et les deux garçons rentrent en Angleterre, et Philip et Francis grandissent chez leurs grands-parents à Norwich. Philip Pullman étudie à l’école bilingue Ysgol Ardudwy (Pays de Galles) puis à l’Université d’Oxford (Angleterre). Il devient professeur universitaire et se lance en littérature aussi bien pour la jeunesse que pour les adultes (romancier, dramaturge). Plus d’infos sur son site officiel.

La lecture de ce deuxième tome, c’est tout nouveau pour moi puisque j’avais lu le premier tome il y a des années (peu de temps après sa parution) et j’avais vu le premier film mais je n’ai aucune idée de la suite. D’ailleurs, ça démarre avec un certain William (Will) Parry que je ne connais pas.

Will, 12 ans, laisse sa mère, prise de confusion mentale depuis que deux inconnus sont venus la harceler, chez madame Cooper, la professeure de piano. Deux hommes sont dans leur maison et l’un deux meurt en trébuchant sur le chat Moxie… Will s’enfuit avec le seul bien de sa mère, une écritoire en cuir vert qui contient des lettres, et part à la recherche de son père, disparu depuis dix ans. La seule chose que sa mère lui a dite est que « John Parry était un bel homme, un officier des Royal Marines, courageux et intelligent, qui avait quitté l’armée pour devenir explorateur et conduire des expéditions dans les endroits les plus reculés du globe. » (p. 20) mais Will n’a jamais trouvé aucune trace de lui. Par contre, il trouve une brèche et, en s’y cachant, il arrive dans un autre monde où il rencontre « Lyra Belacqua, surnommée Lyra Parle-d’Or par le roi Iorek Byrnison. » (p. 72). Cette ville, en bord de mer, abandonnée, c’est Cittàgazze et il y a des Spectres qui ont vidé les adultes de leur substance. « Peut-être une guerre dans les cieux parviendra-t-elle à chasser tous les Spectres de ce monde et à les renvoyer dans les enfers d’où ils sont sortis. Quel bienfait ce serait ! Nour pourrions enfin vivre heureux, libérés de cet effroyable fléau ! » (p. 185).

Pendant ce temps, madame Coulter complote avec des membres de l’Église et la sorcière Serafina Pekkala réunit un concile avec des sœurs, dont Ruta Skadi, qui elles aussi ont vu des horreurs faites aux enfants et à leur dæmon, et pour la première fois un homme y assiste, c’est Lee Scoresby.

Grâce à la brèche empruntée par Will, Lyra et Will vont dans le monde de Will pour effectuer chacun des recherches, Lyra sur la Poussière, ici appelées les Ombres avec le Dr Mary Malone, et Will pour découvrir des choses sur son père. Mais l’Oxford de Will est vraiment différent de l’Oxford de Lyra et les deux jeunes ne doivent pas se faire repérer, chacun pour des raisons différentes.

Il y a bien des dangers, les Spectres, le Couteau, madame Coulter, Lord Boreal… Dans ce deuxième tome, le lecteur suit particulièrement Lyra, Will et Lee Scoresby, les sorcières menées par leur reine Serafina Pekkala, le Dr Mary Malone, Marisa Coulter, et ce sur au moins trois mondes. « Lee sentit son moral remonter en même temps que son ballon. Un jour, il avait dit à Serafina Pekkala que voler ne l’intéressait pas, ce n’était qu’un métier pour lui, mais il n’était pas sincère en disant cela. S’élever dans les airs, avec un vent propice dans le dos, et devant soi, un nouveau monde : que pouvait-il y avoir de meilleur dans la vie ? » (p. 290). L’aléthiomètre est toujours là mais l’objet principal ici est le poignard subtil et il est question de l’Æsahahættr (un être humain, un objet, un Ange ?).

Que d’aventures dans cette Tour des Anges ! Un tome dense, avec de nouveaux personnages, plein de dangers et d’imaginaire à la fois fantastique et science-fiction ! Les lecteurs apprennent de plus en plus de choses de plusieurs personnes différentes et se sentent un peu privilégiés car ils en savent plus que Lyra et Will réunis. D’ailleurs, au contact de Will, Lyra a mûri, elle s’est radoucie, en un mot elle est moins arrogante. Cependant, l’histoire s’éparpille peut-être un peu mais bon… Prêts pour le tome 3, pour le combat impitoyable entre les différentes forces ?

Pour Bingo littéraire d’Hylyirio (case n° 11, un livre avec une couverture bleue, 3e billet), Challenge lecture 2023 (catégorie 12, un livre avec une plante sur la couverture, il y a 4 palmiers et plusieurs arbres), Contes et légendes 2023 (dæmons, sorcières, Anges, autres mondes…), Jeunesse & young adult #12, Littérature de l’imaginaire #11, Petit Bac 2023 (catégorie Bâtiment pour Tour, 2e billet), Un genre par mois (en février, c’est toujours drame) et Voisins Voisines 2023 (Angleterre).

Les royaumes du nord de Philip Pullman

Les royaumes du nord de Philip Pullman.

Folio Junior, n° 1051, octobre 2017 (nouvelle édition), 528 pages, 10,30 €, ISBN 978-2-07-509123-7. Northern Lights (1995) est traduit de l’anglais par Jean Esch.

Premier tome de la trilogie À la croisée des mondes qui m’a été envoyé par Lecteurs.com, merci !

Genres : littérature anglaise, littérature jeunesse, fantastique, science-fiction.

Philip Pullman naît le 19 octobre 1946 à Norwich dans le Norfolk en Angleterre. Son père étant pilote de la Royal Air Force, la famille le suit en Afrique (Rhodésie, Zimbabwe…) mais lorsque le père meurt dans un crash d’avion au Kenya en 1954, la mère et les deux garçons rentrent en Angleterre, et Philip et Francis grandissent chez leurs grands-parents à Norwich. Philip Pullman étudie à l’école bilingue Ysgol Ardudwy (Pays de Galles) puis à l’Université d’Oxford (Angleterre). Il devient professeur universitaire et se lance en littérature aussi bien pour la jeunesse que pour les adultes (romancier, dramaturge). Plus d’infos sur son site officiel.

Jordan College, Oxford. Lyra, 11 ans, et son dæmon Pantalaimon (Pan) sont entrés dans le Salon où ne se réunissent que des hommes, les Érudits. Pris au piège, ils se cachent et voient le Maître verser de la poudre dans la carafe de Tokay 1898 destinée à Lord Asriel. « En fait, elle était surtout inquiète, mais pas pour elle-même. À force de se trouver dans des situations délicates, elle avait fini par s’y habituer. Non, cette fois, elle s’inquiétait au sujet de Lord Asriel, et se demandait ce que tout cela signifiait. Ce n’était pas souvent qu’il venait ici au Collège, et le fait que sa visite ait lieu en période de fortes tensions politiques indiquait qu’il ne venait pas seulement pour manger, boire et fumer avec quelques vieux amis. Elle savait que Lord Asriel et le Maître étaient l’un et l’autre membres du Conseil du Cabinet, l’organe consultatif particulier du Premier Ministre ; mais les réunions du Conseil se déroulaient au Palais, et non pas dans le Salon de Jordan College. » (p. 19-20). Lyra ne peut pas laisser son oncle se faire empoisonner !

En prévenant son oncle in extremis, Lyra lui sauve la vie mais elle voit les photos qu’il montre aux Érudits et elle veut aller avec lui dans le Grand Nord ! « Je veux voir les Lumières du Nord, les ours et les icebergs, et tout le reste. Je veux savoir ce qu’est cette Poussière. Et cette ville flottante. Est-ce un autre monde ? » (p. 43). Vous pensez bien que Lord Asriel refuse.

Ce roman se déroule dans notre monde mais pas vraiment notre monde, un monde imaginaire avec des petits côtés steampunk, fantastique, science-fiction et évidemment beaucoup d’aventures. Par exemple, il y a, dans le royaume de Britannia, entre autres une Cour de Discipline Consistoriale, un Conseil d’Oblation, un Magisterium, un pape Jean Calvin qui a « transféré le siège de la Papauté à Genève » (p. 45), une théorie Barnard-Stokes, « deux théologiens renégats qui posèrent comme hypothèse l’existence de nombreux autres mondes semblables à celui-ci, ni ciel ni enfer, mais des mondes matériels souillés par le péché. Tout proches de nous, mais invisibles et inaccessibles. La Sainte Église a tout naturellement réfuté cette hérésie abominable, et Barnard et Stokes furent réduits au silence. » (p. 46), des mondes parallèles donc. Et Lyra, sans le savoir, est déjà mêlée à tout ça mais contrairement aux apparences, le Maître et le Bibliothécaire de Jordan College font tout pour la protéger le plus longtemps possible.

Roger, le meilleur ami de Lyra, est un marmiton avec qui Lyra s’amuse beaucoup (escalades des toits du Collège, crachats de noyaux de prunes, imitations, courses folles, vols à l’étalage et petites bagarres entre bandes rivales). Mais une femme avec un singe doré enlève les enfants prépubères dans plusieurs villes ; les habitants les appellent les Enfourneurs et personne ne revoit jamais les enfants. Pour Lyra, ce n’était qu’une rumeur jusqu’à ce que des enfants – dont Roger – disparaissent à Oxford…

Quand Lyra fait la connaissance de madame Coulter, elle ne sait pas que c’est cette femme et son singe doré qui enlèvent les enfants… Elle doit partir avec elle et elle en est ravie, quelle aventure ! Mais avant le départ, le Maître lui remet un genre de boussole, en fait un aléthiomètre, « Il n’en existe que six dans le monde, celui-ci est l’un deux. Je te le répète, Lyra : ne le montre à personne. Il serait même préférable que Mme Coulter ne le voie pas. Ton oncle… […] Ça sert à dire la vérité. Mais pour savoir comment le lire, tu devras apprendre par toi-même. Va-t-en maintenant… le jour se lève. […] Lord Asriel a présenté cet instrument à Jordan College il y a quelques années. Peut-être pourra-t-il… […] Fais vite, petite, dit-il à voix basse. Les forces de ce monde sont très puissantes. Les hommes et les femmes obéissent à des courants beaucoup plus féroces que tu ne peux l’imaginer, qui nous balayent et nous entraînent malgré nous. Va, Lyra, que Dieu te protège. Et surtout, garde tes pensées pour toi. » (p. 100-101).

Et voici Lyra lancée dans le monde, à Londres où madame Coulter connaît « beaucoup de gens différents, qu’elle rencontrait dans toutes sortes d’endroits » (p. 110), des explorateurs, des militaires, des Skraelings, des scientifiques, des politiciens… Lyra découvre les grands magasins, les salons de thé, le théâtre… et madame Coulter lui enseigne tout ce qu’une jeune fille doit savoir, bref une vie trépidante, « élégante et raffinée » (p. 115) mais manquant cruellement de liberté. Lyra et Pan s’enfuient mais la ville de Londres est dangereuse et elle obtient le secours de gitans qui sur leur péniche se rendent à Byanplats dans les Fens mais je ne vous en dis pas plus car Lyra et Pan ont encore beaucoup de choses à vivre et à découvrir.

Je rajoute simplement que l’ours Panserbjorn sur la couverture, c’est Iorek Byrnison. Les gitans et Lyra sont aussi accompagnés de Lee Scoresby, un voyageur qui a un ballon dirigeable. Tous se dirigent vers Bolvangar dans le Grand Nord.

Deux ans avant la parution du premier tome de Harry Potter, voici le premier tome de la trilogie de Philip Pullman. Un tome plein, non pas vraiment de magie, mais de questionnements sur la vie, la parentalité, le passage à l’âge adulte, le pouvoir, la religion (le péché originel), la philosophie, l’avenir, et un mélange de science-fiction (technologie, steampunk, Poussière ou particules élémentaires inconnues, univers parallèles…) et de fantastique (dæmons, animaux qui parlent, ours en armures, sorcières…). Et bien sûr de l’aventure, de l’amitié, du courage et des dangers ! Je situerais le roman début du XXe siècle avec les grandes expéditions dans le nord mais l’auteur n’en dit rien, ce n’est donc qu’une supposition. En tout cas, Lyra – et les lecteurs captivés – vont de rebondissements en révélations dans ce premier tome foisonnant et passionnant ! Attention froid glacial dans le Grand Nord alors un feu de cheminée ou un plaid sont les bienvenus ! Les descriptions sont géniales et mes deux personnages préférés sont le dæmon Pantalaimon et l’ours Iorek Byrnison mais tous les personnages ont leurs particularités et l’auteur les a très bien élaborés.

Je suis très contente d’avoir relu Les royaumes du nord et je vais enfin pouvoir lire la suite !

Pour ABC illimité (lettre P pour prénom), Bingo littéraire d’Hylyirio (case n° 11, une couverture bleue), Challenge lecture 2023 (catégorie 40, un livre dont la couverture est un dessin), Contes et légendes 2023 (légendes du Nord, dæmons, sorcières…), Jeunesse & young adult #12, Littérature de l’imaginaire #11, Petit Bac 2023 (catégorie Lieu pour Nord), Un genre par mois (en février, drame) et Voisins Voisines 2023 (Angleterre).

En un combat douteux… de John Steinbeck

En un combat douteux… de John Steinbeck.

Folio, n° 228, octobre 1972, 384 pages, 9,20 €, ISBN 978-2-07036-228-8. In Dubius Battle (1936) est traduit de l’américain par Edmond Michel-Ty.

Genres : littérature états-unienne, roman social, drame.

John Steinbeck naît le 27 février 1902 à Salinas en Californie (États-Unis). Son père est d’origine allemande et sa mère d’origine irlandaise. Comme l’été, il travaille dans les ranchs voisins, il découvre la vie des travailleurs agricoles itinérants et leurs difficultés. Il étudie la littérature anglaise à l’Université Stanford à San Francisco. Il a une vie riche en expériences professionnelle et humaine. Il écrit plusieurs romans et nouvelles (prix Nobel de littérature en 1962) ainsi que des récits et reportages. Il meurt le 20 décembre 1968 à New York.

Années 1930, États-Unis. Après avoir perdu son père et sa mère, avoir fait de la prison injustement, Jim Nolan abandonne tout et décide d’entrer au parti. « J’ai coupé les ponts entre moi et mon passé. Je veux commencer une nouvelle vie. » (p. 18). Jim veut faire quelque chose d’utile, quelque chose qui ait un sens, ne plus être une victime. Il rejoint la planque de Mac et devient dactylographe mais ce qu’il veut, c’est « être envoyé en mission de propagande » (p. 35).

Sa première mission sera justement avec Mac, grimper dans le wagon vide d’un train de marchandises, récolter des pommes dans la vallée de Salinas en Californie, organiser les ouvriers mal payés, et au passage aider à un accouchement. « […] il y en a trop qui ont crevé de faim […] ; peut-être trop de patrons qui on exploité leurs ouvriers. Je ne sais pas. Je sens ça sous ma peau. » (le vieux Dan, p. 78).

Les ouvriers agricoles, mécontents de la baisse des salaires pour la récolte des pommes, savent que ce sera pire pour la récolte du coton qui vient après, ils commencent à parler, la tension monte… d’autant plus que le vieux Dan, 71 ans, est tombé d’une échelle dont deux barreaux se sont cassés (c’est ça le matériel qu’on leur donne pour travailler ?).

Mac, sous prétexte d’organisation, n’hésite pas à jeter de l’huile sur le feu, à considérer les dommages collatéraux comme normaux… Je comprends le combat social qu’ont mené ces hommes mais ils se fichaient complètement des pertes humaines, seul le résultat comptait… « Il faut que nous nous montrions habiles, impitoyables, et que nous agissions rapidement. […] Nous pouvons réussir si les hommes consentent à se serrer les coudes. Les propriétaires n’en mèneraient pas large. » (Mac, p. 140). Après qu’il y ait eu un mort et que Mac veuille en profiter : « Nous en avons besoin pour exciter nos hommes, pour les tenir. Ça les rapprochera ; ils auront une raison de combattre. – Salaud ! ricana Dakin. Vous n’avez donc pas de cœur. Vous n’avez qu’une idée en tête : la grève ! » (Mac puis Dakin, p. 188) et « S’ils viennent avec des fusils, […] ils vont nous tuer des hommes. […] – Ce ne serait pas mauvais […]. Supposons qu’ils tuent des hommes. Ce serait avantageux pour la cause. À chaque victime correspondraient dix recrues. […] » (Jim puis Mac, p. 356). Alors on comprend bien le titre, un combat douteux…

Mais, d’un autre côté, à propos des ‘vigilants’, « Ceux qui ont brûlé les maisons d’Allemands pendant la guerre. Ceux qui lynchent les nègres. Ils sont cruels à plaisir. Ils aiment faire du mal, et ils appellent ça d’un joli nom, patriotisme, ou protection de la Constitution. Les patrons se servent d’eux et leur disent : ‘Il faut protéger le gens contre les communistes.’ Alors, ils brûlent les maisons et torturent les gens, sans courir de danger. C’est tout ce qu’il leur faut. Ils sont lâches. Ils tirent embusqués ou ils attaquent les autres à dix contre un. C’est ce qu’il y a de pire au monde, cette race. » (Mac, p. 191).

Ce roman est considéré comme le premier de la trilogie des romans sociaux de Steinbeck ou trilogie du travail (Labor Trilogy) car suivent Des souris et des hommes (1937) et Les raisins de la colère (1939). Donc je suis contente d’avoir commencé par En un combat douteux et je remercie tadloiduciné (qui officie sur le blog de Dasola) de m’avoir conseillé ce titre. L’auteur avance peu à peu et emmène ses personnages et ses lecteurs jusqu’au bout du drame, du tragique.

Steinbeck décrit le désespoir et la colère des ouvriers abusés par le système patronal, méprisés par les ‘honnêtes gens’, battus et enfermés par des policiers ou des milices violents et vicieux… Les descriptions (personnages et paysages) sont incroyables, les personnages sont tous différents et paraissent bien réels, les dialogues sont très bien menés et j’ai apprécié le discours (la pensée) du docteur Burton (chapitre 8), il se pose des questions, il veut aider mais il n’est pas dupe… Mac sert-il la cause des pauvres gens ou se bat-il pour une idéologie qui se moque des gens et des pertes ?

Adaptation au cinéma : In Dubious Battle (en français, Les insoumis) réalisé par James Franco en 2016 (bande annonce ci-dessous, en VF, je n’ai pas trouvé en VOST).

J’ai lu ce roman exprès pour Les classiques c’est fantastique #3 car le thème de janvier est ‘Jamais sans mon Steinbeck’ mais il entre aussi dans 2023 sera classique, ABC illimité (lettre J pour prénom), Challenge lecture 2023 (catégorie 41, un livre dont on n’aime pas la couverture, je n’aime pas cette couverture parce qu’elle ne correspond pas du tout au contenu du roman, on pense plutôt à des ouvriers dans l’industrie, plutôt pétrolière, alors que le roman raconte la grève d’ouvriers agricoles dans des vergers…) et Tour du monde en 80 livres (États-Unis).

La bibliothèque de Mount Char de Scott Hawkins

La bibliothèque de Mount Char de Scott Hawkins.

Denoël, collection Lunes d’encre, août 2017, 480 pages, 22,90 €, ISBN 978-2-20713-552-5. The Library at Mount Char (2015) est traduit de l’américain par Jean-Daniel Brèque. Je l’ai lu en poche : Folio SF, n° 633, mai 2019, 576 pages, 9,10 €, ISBN 978-2-07284-464-5.

Genres : littérature états-unienne, roman, fantasy.

Scott Hawkins naît en 1969 aux États-Unis. Il est informaticien spécialisé dans les systèmes Unix et Linux. La bibliothèque de Mount Char est son premier roman.

Carolyn, ensanglantée et pieds nus, marche sur la Highway 78, elle retourne chez elle à Garrison Oaks. À la première page, il y a cette phrase que je note telle quelle : « Le poignard d’obsidiennetours dans la ce avec lequel elle avait tué le détective Miner était niché au creux de ses reins, secret et affûté. » (p. 13). Hum, soit il y a des mots en trop soit il manque des mots mais j’espère qu’il n’y a pas d’autres erreurs de ce genre… (en fait il n’y en a pas).

Carolyn avait 8 ans lorsque ses parents sont morts assassinés. Avec quelques autres enfants américains, elle a été recueillie par Père. « Vous êtes maintenant des Pelapi, dit Père. C’est un mot très ancien. Il signifie quelque chose comme « bibliothécaire » et quelque chose comme « élève ». Je vous emmènerai dans ma maison. Je vous élèverai à l’ancienne, comme j’ai moi-même été élevé. Je vous enseignerai les choses que j’ai apprises. » (p. 17). Voici comment Carolyn est devenue « bibliothécaire ».

Les (12) enfants : Carolyn, Margaret, David, Michael, Emily, Jennifer, Alicia, Rachel, Peter et Richard (des jumeaux), Lisa, Jacob (dans l’ordre où leurs prénoms apparaissent). Ils ont été éduqués à la dure avec chacun une matière (un catalogue). Pour Carolyn, ce fut les langues, toutes les langues du monde entier et même les oubliées. Ils n’ont absolument pas le droit de partager les uns avec les autres ce qu’ils étudient.

Un quart de siècle après, Père a disparu et les enfants maintenant adultes le cherchent, chacun selon les capacités acquises mais… « Il n’est dans aucun avenir et il n’est pas mort. Comment est-ce possible ? » (p. 37). La Bibliothèque leur est devenue inaccessible… Même le fidèle Nobununga n’a pas pu y entrer. Et si David avait tué Père ? « Uzan-iya, disait-on dans les steppes de l’Himalaya il y avait six mille ans de cela. Uzan-iya – l’instant où le cœur pour la première fois a des envies de meurtre. » (p. 134).

En parallèle, Erwin Leffington « Ancien de la 82e division aéroportée, aujourd’hui enquêteur spécial pour la Sécurité intérieure » (p. 253) enquête sur Carolyn et ses frères et sœurs, ainsi que sur Steve Hogdson suspecté d’avoir tué Miner.

Dans ce roman vraiment étrange (et super violent), il y a un taureau dans lequel on fait des barbecues, des chiens dangereux, un lion et sa fille (mes personnages préférés), des « bibliothécaires » troublants… L’auteur, pour un premier roman, a une imagination débordante et va très loin dans l’horreur donc à ne pas mettre entre toutes les mains. Le lecteur peut être un peu perdu au début de la lecture mais il faut persévérer car ce roman foisonnant se mérite ! Il est classé en fantasy et a reçu un prix fantasy (Elbakin 2018) mais il y a un côté science-fiction indéniable et résolument un côté terrifiant : en littérature comme en musique, il existe la fusion des genres et ça vaut le coup de tester. Je dirais donc que La bibliothèque de Mount Char est un OLNI (Objet Littéraire Non Identifié) qui ne plaira pas à tout le monde mais laissez-lui sa chance !

Je mets cette lecture dans les challenges Animaux du monde #3 (pour le lion et la lionne, je ne donne pas leurs noms humains car ils ne les aiment pas), Challenge du confinement (case Fantasy), Littérature de l’imaginaire #8.

La dispute de Marivaux

La dispute de Marivaux.

Folio Plus Classiques, n° 181, décembre 2009, 144 pages, 5,70 €, ISBN 978-2-07039-662-7.

Genres : littérature française, théâtre, XVIIIe siècle.

Marivaux, de son vrai nom Pierre Carlet de Chamblain de, naît le 4 février 1688 à Paris, dans une famille noble originaire de Normandie. Il est journaliste, romancier (La voiture embourbée, Le bilboquet, La vie de Marianne et Le paysan parvenu, entre autres) et philosophe mais il est plus connu en tant que dramaturge : il écrit des pièces pour le Théâtre italien de Paris et pour la Comédie française. Il est possible de lire ses œuvres sur WikiSource. De son pseudonyme sont nés les mots « marivauder » et « marivaudage ».

Cette pièce est « représentée pour la première fois par les comédiens français ordinaires du roi, le lundi 19 octobre 1744 » (p. 5) ; Marivaux a 56 ans.

Après une dispute (« discussion, débat plus ou moins âpre et violent », p. 9), un homme fait construire en forêt une maison entourée de hauts murs pour faire une expérience : quatre bébés y sont placés, deux garçons et deux filles, et sont élevés par un couple, une femme Carise et un homme Mesrou, mais ils grandissent sans jamais se voir. Dix-huit ans plus tard vient le moment de découvrir le résultat de cette expérience : après leurs rencontres, qui commettra le premier – ou la première – l’inconstance et l’infidélité, un homme ou une femme ?

Le Prince, fils de l’homme qui a monté cette expérience, emmène sa bien-aimée Hermiane qui soutient que la femme n’est ni inconstante ni infidèle au contraire de l’homme. Depuis le sommet des remparts, sans se faire voir, ils observent comme si c’était un spectacle.

Le lecteur fait d’abord la connaissance d’Églé, une belle jeune femme, qui rencontre Azor, un beau jeune homme : après un moment de surprise, ils se plaisent mais doivent se séparer quelque temps. Arrive alors Adine qui se trouve bien plus belle qu’Églé et qui vante les charmes de son Mesrin qu’Églé ne connaît pas mais qu’elle va rencontrer bientôt.

Églé parlant d’Azor à Carise : « il veut que ma beauté soit pour lui tout seul, et moi je prétends qu’elle soit pour tout le monde. » (p. 35).

La pièce est plutôt comique surtout quand Azor et Mesrin sautent tous les deux tant ils sont contents mais quel sera le résultat de cette expérience sur l’élan amoureux, sur l’amour et sur sa constance ?

En complément de cette curieuse comédie en prose (1 acte avec 20 scènes), deux dossiers en fin de volume.

Le premier intitulé Du tableau au texte d’Alain Jaubert sur la Jeune femme au tricorne (vers 1755-1760), œuvre intrigante du Vénitien Giovanni Battista Tiepolo (1696-1770) qui illustre la couverture du livre. Il est possible d’analyser ce tableau mais, sur la jeune femme qui pose, on ne sait rien !

Le deuxième intitulé Le texte en perspective de Sylvie Dervaux-Bourdon comporte six chapitres. 1- Mouvement littéraire : Marivaux face aux Lumières naissantes. 2- Genre et registre : une pièce plurielle. 3- L’écrivain à sa table de travail : l’écriture, une quête incessante. 4- Groupement de textes : figures d’ingénus au théâtre, XVIIe-XVIIIe siècles. 5- Chronologie : Marivaux et son temps. 6- Éléments pour une fiche de lecture.

Ces dossiers sont enrichissants non seulement pour les professeurs et les étudiants mais aussi pour tous les lecteurs curieux de théâtre et du XVIIIe siècle ! Après le rationalisme de Descartes (1596-1650), les Lumières se veulent plus philosophiques, plus « éclairés », plus tolérants et plus ouverts.

Comme j’ai terminé cette lecture de la Semaine à 1000 pages hier soir à 23 heures (soit une heure avant la fin du marathon), j’ai rédigé dans la foulée cette note de lecture que je mets dans Cette année, je (re)lis des classiques #3 et aussi dans Lire en thème de février puisque l’auteur est Français.

La fameuse invasion de la Sicile par les ours de Dino Buzzati

La fameuse invasion de la Sicile par les ours de Dino Buzzati.

Gallimard, collection Folio Junior n° 490, collection Textes classiques, 1977 – 1982 – 1988 – 1997 – 2009 (précédemment publié chez Stock en 1968), 128 pages, 5,90 €, ISBN 978-2-07062-374-7. Illustrations de l’auteur (en couleur à l’origine). La famosa invasione degli orsi in Sicilia (1945) est traduit de l’italien par Hélène Pasquier.

Genres : littérature italienne, littérature jeunesse, conte.

Dino Buzzati naît le 16 octobre 1906 à San Pellegrino di Belluno dans la région de Vénétie. Il étudie le Droit à l’Université de Milan mais il est embauché comme journaliste par le Corriere della Sera. Il est aussi peintre, écrivain et critique littéraire. Il meurt d’un cancer le 28 janvier 1972 à Milan. De lui, j’ai déjà lu Le Désert des Tartares (son plus célèbre roman, paru en 1940) et Le K (un recueil de nouvelles, paru en 1966) et j’ai apprécié le côté fantastique. Avec La fameuse invasion de la Sicile par les ours, je lis un de ses contes, mais il a aussi écrit de la poésie et du théâtre donc il me reste des choses à lire !

Le roman commence par une présentation des personnages et des décors, ça fait un peu théâtral, ça m’a bien plu et puis c’est présenté avec humour.

L’ourson Tonin, fils de Léonce Roi des ours, a été enlevé par deux chasseurs. Deux ans après, les ours font face au froid et à la faim alors ils décident de descendre pour la première fois dans la plaine, là où vivent les humains. « Et les montagnes d’où nous sommes partis. Les reverrons-nous jamais, nos vieilles montagnes ? » (p. 18). Les ours ne sont pas les bienvenus et ils doivent se battre contre l’armée du Grand-Duc, un tyran. « Mais que peuvent les ours, armés de lances, de flèches, de harpons / contre des fusils, des mousquets, des couleuvrines, des canons ? » (p. 24). J’ai oublié de vous dire qu’une partie du roman est racontée sous forme de poésie ! Le Grand-Duc et le magicien De Ambrosiis se réfugient au château de Cormoran mais les ours, valeureux, emmenés par le courageux ours Babbon défient l’armée humaine. Au début, c’est un « Désastre complet » (p. 56) mais un autre ours, plutôt bricoleur, Frangipane, va faire gagner les ours. Pendant que la bataille fait rage, il y a un spectacle au Grand Théâtre Excelsior et, parmi les artistes, un ourson acrobate, rebaptisé Goliath. Oui, oui, vous avez deviné et il va s’en passer des choses ! D’ailleurs, pendant plus de dix ans, les ours vont vivre avec les humains mais leur comportement va changer ce qui déplaît au Roi Léonce.

Ce conte, joliment illustré (par l’auteur lui-même !) s’est déroulé il y a très longtemps car il n’y a plus de montagnes en Sicile, il n’y a plus d’ours non plus… Mais la magie et l’humour de Dino Buzzati font vivre cette histoire pour les petits et les grands lecteurs ! Avec la sortie du film d’animation réalisé par Lorenzo Mattotti et présenté au Festival de Cannes en mai 2019, le livre paraît à nouveau en mai 2019 (couverture ci-contre).

Une lecture plaisante que je mets dans les challenges Cette année, je (re)lis des classiques, Contes et légendes pour la piste « Des animaux à la fête », Jeunesse & Young Adult #9 et Littérature de l’imaginaire #7.

Un coup de tonnerre de Ray Bradbury

[Article archivé]

Un coup de tonnerre est un recueil de nouvelles de Ray Bradbury.

Parues à l’origine aux États-Unis entre 1948 et 1964, ces nouvelles ont été éditées par Denoël entre 1954 et 1965 puis par Gallimard en 1992 avec un supplément et par Gallimard Jeunesse en 1997.

J’ai lu l’édition spéciale Folio Jeunesse rééditée en 2004 avec des illustrations de Michel Politzer et un supplément de 32 pages (avec des jeux, quiz, infos pédagogiques et littéraires) réalisé par Christian Grenier et illustré par Marc Lagarde.

Ray Bradbury est né le 22 août 1920 à Waukegan dans l’Illinois (États-Unis) et il est mort le 5 juin 2012 à Los Angeles en Californie laissant une œuvre abondante (romans, nouvelles, poésie, théâtre) en science-fiction, anticipation, fantastique voire horreur et gothique. Ses œuvres ont été adaptées au cinéma, à la télévision, en bande dessinée. Plus d’infos sur le site officiel, http://www.raybradbury.com/.

Un coup de tonnerre (A sound of thunder, 1952) – 2055. La société La chasse à travers les âges propose de voyager dans le temps pour chasser le Tyrannausorus rex, le Lézard du Tonnerre. Dans la machine, cinq personnes voyagent plus de soixante millions d’année avant. Mais personne ne doit rien toucher, ni la faune ni la flore ni même le sol afin de ne pas mettre ne péril le futur. « Garantissez-vous qu’on en revienne vivant ? – Nous ne garantissons rien, répondit l’employé, sauf les dinosaures. » (p. 9). « Signez ce papier. Quoi qu’il arrive, nous ne sommes pas responsables. Ces dinosaures sont affamés. » (p. 11).

Ils avaient la peau brune et les yeux dorés (Dark they were, and golden-eyed, 1949) – La famille Bittering – un couple, Harry et Cora, et leurs trois enfants, Dan, Laura et David – et d’autres colons arrivent sur Mars. Harry s’y sent mal à l’aise et veut retourner sur Terre mais c’est impossible. « Pense. Oblige-toi à penser. Pense à n’importe quoi. Mais chasse de ton esprit la Terre, la guerre atomique et les fusées détruites. » (pages 35-36). « Jamais il ne pourrait se libérer de sa peur. Elle lui serrait la gorge, elle lui broyait le cœur. Elle mouillait son bras, sa tempe, sa paume tremblante. » (p. 41).

Vacance (The vacation, 1963) – « Ce serait tellement agréable… » (p. 59) avait dit l’homme à son épouse. Depuis le couple et leur jeune fils, Jim, voyagent dans un vieux wagonnet. Il n’y a plus qu’eux sur Terre.

« Jeunes amis, faites pousser des champignons dans votre cave » (Boys ! Raise giant mushrooms in your cellar !, 1962) – Un samedi comme les autres chez Hugh et Cynthia Fortnum. Leur fils, Tom, a reçu un colis : ce sont les champignons qu’il veut faire pousser dans la cave. « Le Mammouth-des-clairières, espèce sylvatique, pousse garantie, une mine d’or dans votre cave ! » (p. 70). Hugh Fortnum rencontre son ami Roger Willis : celui-ci a peur de quelque chose sans savoir quoi et le lendemain, il disparaît.

La sirène (The fog horn, 1951) – McDunn et son apprenti, Johnny (le narrateur), vivent et travaillent dans un phare. Au sommet de ce phare, une sirène mugit, c’est la sirène de la Baie solitaire. « L’Océan, vois-tu, est la plus damnée mare de neige fondue qu’on ait jamais inventée. Il roule et brasse mille formes et couleurs sans que deux d’entre elles s’y ressemblent. Et parfois des choses étranges s’y passent. » (p. 96).

L’enfant invisible (Invisible boy, 1945) – Ses parents s’étant absentés, Charles vit chez sa tante, Vieille Dame. Mais elle est une sorcière et elle veut rendre l’enfant invisible. « Elle avait enfoncé une aiguille dans sa maigre épaule, avait recueilli trois gouttes de sang, craché par-dessus son bras droit, marché sur un grillon écrasé et, au même moment, tendu sa main crochue […]. » (p. 110).

L’homme (The man, 1949) – Le capitaine Hart et le lieutenant Martin atterrissent à bord de leur fusée sur la Planète 43 du Système stellaire 3 mais personne ne vient les accueillir. « Peut-être cherchons-nous la tranquillité et la paix ? En tout cas, il n’y en a pas sur la Terre. » (p. 126).

La fusée (The rocket, 1950) – Fiorello, mariée à Maria, père de cinq enfants, possède un petit chantier de ferraille et rêve de monter dans une des fusées qu’il regarde passer la nuit. « Pense à ce que tu pourras voir, […]. Les météores, comme des poissons. L’univers. La Lune. Celui qui ira doit savoir raconter. Et tu sais parler. » (p. 147).

Dans ce recueil, pas de vilain petit canard ! Les huit nouvelles de science-fiction sont excellentes voire parfaites ! Bien écrites, bien dosées, inquiétantes sans être effrayantes. Elles jouent sur les défauts du genre humain, sur ses peurs et sur ce qui est inexplicable ou inéluctable. Angoissantes à souhait donc ! L’homme est une histoire plus ésotérique et La fusée est plus tendre. Je ne saurais dire laquelle de ces huint nouvelles est ma préférée tant elles ont toutes leur raison d’être. Pour chaque nouvelle, j’ai voulu choisir au moins un extrait. Lisez les nouvelles de Ray Bradbury et vous ne serez pas déçus mais un conseil, quand même : faites attention aux champignons !

J’ai un peu de retard pour publier cette note de lecture car j’avais lu ce livre durant le Ray’s Day (le 22 août). Je le mets dans les challenges ABC critiques 2014-2015 (lettre B), Animaux du monde (Tyrannosaure), Anticipation, Arche de Noé (je « sauve » les dinosaures !), Fant’classique, Geek, Jeunesse & young adults # 3, Le mélange des genres (roman SF / fantastique / imaginaire), Mois américain et Un classique par mois.

Le ruban moucheté et autres aventures de Sherlock Holmes d’Arthur Conan Doyle

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Le ruban moucheté et autres aventures de Sherlock Holmes est un recueil de 4 nouvelles de Sir Arthur Conan Doyle paru aux éditions Robert Laffont en 1956. J’ai lu celui paru aux éditions Folio junior en août 1995 (167 pages, 5,60 €, ISBN 2-07-058724-X) mais d’autres éditions plus récentes ou intégrales sont parues depuis.

The adventures of Sherlock Holmes est traduit de l’anglais par Bernard Tourville et illustrées par Philippe Munch.

Ces nouvelles ont d’abord été publiées dans le Strand Magazine avec des illustrations de Sidney Paget puis dans le premier recueil de nouvelles The Adventures of Sherlock Holmes / Les aventures de Sherlock Holmes paru en octobre 1892.

Les cinq pépins d’orange – Fin septembre 1887, un soir de tempête, John Openshaw, de Orsham dans le sud-ouest de l’Angleterre, vient demander l’aide de Sherlock Holmes. Des années après son retour d’Amérique, son oncle Elias a reçu en mars 1883 une enveloppe avec cinq pépins d’orange et un papier avec les lettres KKK. Sept semaines après, Elias était mort, noyé dans 60 cm d’eau… Le père de John, Joseph a pris possession de l’héritage de son frère mais a lui aussi reçu une enveloppe similaire en janvier 1885. Quelques jours après, il se tuait en tombant dans une carrière de craie. Et maintenant, c’est John qui vient de recevoir une enveloppe ! Il est amusant de voir comment l’histoire de l’Amérique influence les Britanniques : après les Mormons dans Une étude en rouge, Sherlock Holmes en profite ici pour raconter les agissements du Ku Klux Klan (eh oui, KKK). The Five Orange Pips est la 5e nouvelle des aventures de Sherlock Holmes, elle est parue en novembre 1891 dans le Strand Magazine. Sir Arthur Conan Doyle la classait 7e dans la liste des 12 nouvelles de Sherlock Holmes qu’il préférait. Il est possible de la lire sur http://en.wikisource.org/wiki/The_Five_Orange_Pips ou sur http://ignisart.com/camdenhouse/canon/five.htm.

Un scandale en Bohème – Si une femme a impressionné Sherlock Holmes, c’est bien Irène Adler. Vous comprendrez pourquoi en lisant cette nouvelle. Après son mariage, Watson a un peu perdu de vue Sherlock Holmes qui a effectué une mission en Russie (à Odessa) et une autre en Hollande. Un soir de mars 1888, Watson décide de rendre visite à son ami. Celui-ci lit une lettre en provenance de Bohème et reçoit un mystérieux client (en fait le Grand-Duc Wilhelm Gottsreich Sigismond von Ormstein). Où on apprend que Sherlock Holmes est le roi du déguisement : « Le théâtre a perdu un merveilleux acteur, de même que la science a perdu un logicien de premier ordre quand il s’est spécialisé dans les affaires criminelles. » (p. 71). Après les deux romans, Une étude en rouge et Le signe des quatre, A Scandal in Bohemia est la première des 56 nouvelles narrant les aventures de Sherlock Holmes. Elle est parue en juillet 1891 dans le Strand Magazine. Il est possible de la lire sur http://en.wikisource.org/wiki/A_Scandal_in_Bohemia ou sur http://ignisart.com/camdenhouse/canon/scan.htm.

L’escarboucle bleue – Après Noël, le 28 décembre, le Docteur Watson rend visite à son ami Sherlock Holmes pour lui présenter ses vœux. Sherlock Holmes qui n’est pas habituellement un lève-tôt a déjà lu les journaux et s’apprête à observer à la loupe un vieux chapeau de feutre. Cette affaire fait partie de celles exemptes de crime, comme Un scandale en Bohème avec Irène Adler. Watson apprend comment le commissaire Peterson a récupéré un chapeau melon et une délicieuse oie de Noël ! Et comment Sherlock Holmes, par son extraordinaire esprit de déduction, a retrouvé le gentleman inconnu à qui appartenait le chapeau et l’oie ! Car l’épouse de Peterson a eu la surprise de sa vie en trouvant dans le jabot de l’oie une magnifique pierre précieuse : l’escarboucle bleue de la Comtesse de Maccar, volée le 22 décembre à l’hôtel Cosmopolitan. The Blue Carbuncle est la 7e nouvelle des aventures de Sherlock Holmes, elle est parue en janvier 1892 dans le Strand Magazine. Il est possible de la lire sur http://en.wikisource.org/wiki/The_Adventure_of_the_Blue_Carbuncle ou sur http://ignisart.com/camdenhouse/canon/blue.htm.

Le ruban moucheté – Cela fait maintenant 8 ans que le Docteur Watson étudie les méthodes de son ami Sherlock Holmes, ce qui correspond à 70 affaires « sortant de l’ordinaire » : « il lui fallait l’inhabituel et même le fantastique. » (p. 124). Ainsi, un matin d’avril 1883, à 7 h 15, Hélène Stoner réveilla la maisonnée. Elle est la belle-fille du Docteur Grimesby Roylott, de Stoke Moran, qui vécut aux Indes où il épousa sa mère. Deux ans auparavant, sa sœur jumelle, Julie, est morte de façon étrange, en hurlant de frayeur « le ruban moucheté ». Hélène a peur de subir le même sort et demande de l’aide. Sherlock Holmes et le Docteur Watson se rendent donc dans le Surrey pour sauver la jeune femme d’une mort horrible. The Speckled Band est la 8e nouvelle des aventures de Sherlock Holmes, elle est parue en février 1892 dans le Strand Magazine. Il est possible de la lire sur http://en.wikisource.org/wiki/The_Adventure_of_the_Speckled_Band ou sur http://ignisart.com/camdenhouse/canon/spec.htm.

Les autres nouvelles du recueil The Adventures of Sherlock Holmes / Les aventures de Sherlock Holmes :

2e nouvelle : The Red-Headed League / La ligue des rouquins (août 1891)

3e nouvelle : A Case of Identity / Une affaire d’identité (septembre 1891)

4e nouvelle : The Boscombe Valley Mystery / Le mystère du Val Boscombe (octobre 1891)

6e nouvelle : The Man With the Twisted Lip / L’homme à la lèvre tordue (décembre 1891)

9e nouvelle : The Engineer’s Thumb / Le pouce de l’ingénieur (mars 1892)

10e nouvelle : The Noble Bachelor / Un gentleman célibataire (avril 1892)

11e nouvelle : The Beryl Coronet / Le diadème de béryls (mai 1892)

12e nouvelle : The Copper Beeches / Les hêtres rouges (juin 1892)

J’espère avoir l’occasion de les lire et les présenter bientôt parce que Sherlock Holmes est réellement addictif ! Je suis très contente de me replonger dans cette littérature grâce au challenge Le Signe des trois – Sherlock Holmes créé par Marion, Matilda et Cécile ! Je profite aussi de cette lecture pour terminer – avant la fin de l’année – deux défis de 2010 : J’aime les classiques et English Classics.

La ferme des animaux de George Orwell

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Après avoir dévoré 1984 en une journée car je ne pouvais plus le lâcher, j’ai voulu lire un autre roman de George Orwell pour le défi Littératures de l’imaginaire sur les 5 continents.

La ferme des animaux est un roman plus court écrit en 1945 (publié en Angleterre en 1945 et en France en 1947) soit 4 ans avant 1984. Paru chez Gallimard dans la collection Folio (n° 1516, décembre 2008, 151 pages, ISBN 97862-07-037516-5), Animal Farm est traduit de l’anglais par Jean Quéval.

Genres : littérature anglaise, science-fiction.

J’ai eu l’impression que La ferme des animaux était un galop d’essai avant 1984. George Orwell a imaginé un coup d’État fomenté par un petit groupe d’individus (des animaux) dans un milieu clos (une ferme) et a « observé » ce qu’il s’y passait. Il semblerait que l’auteur n’ait rien laissé au hasard et que, bien que bref, ce récit soit très complet !

Une nuit de mars, le cochon Sage l’Ancien – qui a fait un rêve la nuit précédente – convoque tous les animaux dans la grange et propose aux cochons, chiens, poules, pigeons, vaches, moutons, chevaux, canards, chèvre, âne, corbeau apprivoisé et chatte de faire une révolution pour devenir propriétaire de la ferme et de leur travail. « Nous avons une vie de labeur, une vie de misère, une vie trop brève » (p. 11) et « L’Homme est notre seul véritable ennemi. Qu’on le supprime, et voici extirpée la racine du mal » (p. 12) affirme Sage l’Ancien, entraînant à sa suite tous les animaux, même les plus attachés à l’Homme et même les plus sceptiques. Trois nuit après, ce brave cochon meurt de vieillesse « paisiblement dans son sommeil » (p. 20) mais ses idées demeurent et sont reprises par deux verrats, Boule de Neige et Napoléon ainsi que par un cochon à l’engrais, Brille-Babil qui élaborent « un système philosophique sans faille », l’Animalisme (p. 21). Le 21 juin, la Ferme du Manoir passe des mains de Mr. Jones aux pattes des animaux qui la peuplent et devient la Ferme des Animaux. Mais tout n’est pas idéal, certains animaux apprennent plus vite que d’autres, certains travaillent plus que d’autres, et puis surtout « Tous les animaux sont égaux, mais certains le sont plus que d’autres » !

Je suis sûre que l’auteur n’a pas choisi au hasard certains éléments. La nuit, c’est le symbole du secret, des choses qui ne doivent pas être révélées, et c’est par un « rêve » que tout commence. La ferme, c’est le symbole de la prospérité « Fertile est le sol de l’Angleterre et propice son climat » (p. 11). Le cochon est considéré comme un animal sale qui se roule dans la fange, pourtant le cochon Sage l’Ancien dénonce l’homme qui « ne donne pas de lait, […] ne pond pas d’œufs » et qui est « trop débile pour pousser la charrue, bien trop lent pour attraper un lapin ». Mais n’est-ce pas le cas du cochon ? C’est pourtant lui l’instigateur de la révolution et de tout ce qui va en découler !

Tout y est, la doctrine et les Camarades à sauver, les slogans ou Sept Commandements (p. 30), l’hymne « Bêtes d’Angleterre » (p. 17-18), l’endoctrinement et l’embrigadement, les réunions, le soulèvement, la victoire, les convaincus (cons vaincus ?), les fidèles disciples (qui d’ailleurs vont se tuer à la tâche), les idiots utiles (Bêêêê ! « Quatrepattes, oui ! Deuxpattes, non ! »), l’armée spéciale entraînée en secret (les 8 chiots arrachés à leurs mères et devenus de véritables tueurs dénués de sentiments), « l’émotion, la fièvre et la frénésie » (p. 18), la rééducation (la chatte, plus indépendante, et refusant la rééducation, partira très vite : quel animal intelligent !), et même la foi en un autre monde, la Montagne de Sucrecandi, véhiculée par le corbeau (le seul animal qui voit ce qui se passe à l’extérieur de la ferme).

Lisez ce petit livre pour découvrir comment tout cela va se passer et… se finir (la chute est surprenante). Un roman plein d’humour dans lequel George Orwell dénonce les totalitarismes tout comme dans 1984, mais qui est moins connu ce qui est vraiment dommage.

Ce texte est sûrement un conte fantastique mais il me semble qu’il peut être classé en SF prospective puisque c’est une « simulation faite sur l’évolution d’une société » (voir la page sur les genres et sous-genres en littératures de l’imaginaire).

4e livre pour le défi Blog-o-trésors (après Le treizième conte de Diane Setterfield, 1984 de George Orwell et Le libraire de Regis de Sá Moreira). Défi terminé ! Merci à Grominou pour ce challenge littéraire ! Mais puisque les deux romans d’Orwell sont couplés avec mon défi Littératures de l’imaginaire sur les 5 continents, je vais essayer de lire d’autres romans.

PS du 12 mai : j’ai vu La ferme des animaux, film d’animation de John Halas et Joy Batchelor.

1984 de George Orwell

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1984 est un roman d’anticipation que George Orwell a écrit durant les dernières années de sa vie et qui est paru en 1949 en Angleterre et en 1950 en France.

Folio, n° 822, juin 2008, 408 pages, ISBN 978-2-07-036822-8.

Genres : littérature anglaise, science-fiction.

George Orwell est le pseudonyme d’Eric Arthur Blair, né le 25 juin 1903 au nord-est de l’Inde (à Motihari dans l’État du Bihar) dans une famille anglaise. Il a d’ailleurs étudié en Angleterre (pensionnaire à Saint-Cyprien puis à Eton où Aldous Huxley a été son professeur de français !). Journaliste, critique et écrivain, il a vécu en Inde, en Birmanie (sergent dans la Police Impériale), en Angleterre, en France (dans la pauvreté et où il contracte une pneumonie…), en Espagne (guerre d’Espagne) et a exercé divers métiers. Il a dénoncé les totalitarismes, celui de l’Empire Britannique d’abord, puis le nazisme et le communisme soviétique ensuite. La tuberculose l’a vaincu le 21 janvier 1950 à Londres.

Winston Smith, 39 ans, est employé au Commissariat aux Archives, au Ministère de la Vérité. Il vit à Londres au septième étage d’un immeuble, le bloc de la Victoire, construit dans les années 30. Dans cette Angleterre, renommée l’Océania, tout est dirigé par un Parti et les deux autres nations, l’Eurasia et l’Estasia sont tantôt l’ennemi tantôt l’allié. Les trois slogans du Parti « La Guerre c’est la Paix. La Liberté c’est l’Esclavage. L’Ignorance c’est la Force » (p. 28) font froid dans le dos. Grâce à un conditionnement appelé Les Deux Minutes de la Haine, la population est appelée à détester l’Ennemi du Peuple, en la personne d’Emmanuel Goldstein, « un renégat, un traître, un profanateur du Parti » qui « dénonçait la dictature du Parti, exigeait l’immédiate conclusion de la paix avec l’Eurasia, défendait la liberté de parler, la liberté de la presse, la liberté de réunion, la liberté de pensée » (p. 24). Un matin, pendant Les Deux Minutes de la Haine, les yeux de Winston croisent ceux d’O’Brien et il pense que son collègue ressent les mêmes choses que lui. Après cet événement, Winston décide d’acheter un cahier, une plume, de l’encre (ce qui est inhabituel) et de tenir son journal, il date son premier texte du 4 avril 1984. Peu de temps après, il rencontre Julia qui travaille au Ministère des Romans et dont il va tomber amoureux. Mais dans cet état totalitaire où « Big Brother vous regarde », dans lequel le Novlangue et la Police de la Pensée règnent, avec des télécrans qui espionnent et diffusent continuellement du son et des slogans, il est dangereux de penser, d’éprouver des sentiments et de faire des choses interdites. À moins d’être parmi les Prolétaires qui, parce qu’ils sont considérés par le Parti comme Inférieurs, ont un peu plus de libertés (loisirs, sexualité) quoique…

Une appendice d’une quinzaine de pages annonce les principes du Novlangue, langue officielle de l’Océania.

Mon avis

Un chef-d’œuvre ! Pourquoi ai-je attendu si longtemps avant de lire ce roman ?

Broyés, vous serez broyés par le Parti ! Et n’oubliez jamais que Big Brother vous regarde !

PS : j’ai oublié de dire qu’au départ, j’avais lu ce roman dans le cadre du défi Blog-o-trésors (deuxième livre après Le treizième conte de Diane Setterfield).