Ida n’existe pas d’Adeline Fleury

Ida n’existe pas d’Adeline Fleury.

François Bourin, août 2020, 160 pages, 18 €, ISBN 979-10-252-0497-9.

Genre : roman français.

Adeline Fleury est journaliste et autrice. Parmi ses précédents titres, l’essai Petit éloge de la jouissance féminine (2015) et les romans Rien que des mots (2016) et Je, tu, elle (2018).

« Ida n’existe pas. Ida n’a jamais existé. Ni dans mon corps, ni dans mon esprit. Ida est un fantôme. Elle me hante jour et nuit. Ida est là. […] » (p. 9). Voici comment débute ce roman « librement inspiré d’une histoire vraie » (p. 7).

Le père Mahut, un vieux pêcheur à la retraite, voit sur la plage « le visage ensablé d’un bébé » (p. 12).

Comment une mère a-t-elle pu laisser son bébé sur la plage ? « Depuis qu’elle est entrée dans ma vie, je l’adore autant que je la déteste. […] Chaque femme a cette dualité en elle. Celles qui le nient se mentent à elle-même. » (p. 14). La mère va raconter, la « communication animale » (p. 19) avec Ida depuis 15 mois. Allaitement, « attraction répulsion » (p. 19), dégoût, attendrissement…

Le père d’Ida ? Alfonse, un vieux sculpteur, qui la surnomme sa « Zoulou blanche » (p. 21) mais… « Je ne pensais pas que le sperme d’Alfonse pouvait être fécond. » (p. 20).

« L’amour maternel est effrayant. » (p. 23). Effrayant, oui, c’est le mot en ce qui concerne ce roman…

Et si Ida était l’enfant-poisson dont parlaient sa mère et ses tantes durant son enfance ? L’enfant-poisson que Mami Wata (la Reine des eaux) réclame, « de plus en plus pressante » (p. 57). La mère d’Ida est-elle folle ? Peu à peu le lecteur comprend ce qu’elle a vécu, depuis son enfance durant laquelle elle est surnommée « l’enfant-zèbre » (p. 42). Née dans une tribu Myènè au Gabon, elle est cependant métis à la peau claire et envoyée chez la tante Angèle à Vincennes (en France) à l’âge de 12 ans. En tout cas, elle va maintenant emmener Ida qui n’a aucune existence officielle « au bout du voyage » (p. 41). Elles vont « voir la mer, juste voir la mer » (p. 47).

C’est bizarre que je reçoive ce livre (merci à Lecteurs.com) quelques jours après avoir perdu ma petite-fille… J’ai pris ça comme un signe car c’est le genre de livres que je n’aurais pas lu de moi-même mais je me suis dit pourquoi ne pas soigner le mal par le mal.

Adeline Fleury écorne l’image des « femmes à la maternité flamboyante » (p. 40) et l’image de la mère parfaite. Les chapitres sont courts, c’est percutant, brut, brutal même… « Va à la mer, et fais ce que tu as à faire ! » (p. 89). Quand la vie occidentale se télescope aux traditions africaines, la mère embarque Ida « dans une entreprise d’une beauté tragique » (p. 103). Alors, amour fou, ou pure folie ? Peut-être un peu des deux… Comment vivre, comment se construire après des actes de maltraitance subis dans l’enfance ? Ce roman cru est en tout cas fort dérangeant… Je ne saurais dire si je l’ai aimé ou pas mais je peux vous dire une chose, c’est qu’il est très bien écrit et ça, c’est un bon point.

Je mets cette lecture dans Challenge lecture 2021 (catégorie 15, un livre féministe), Petit Bac 2021 (catégorie Prénom pour Ida) et À la découverte de l’Afrique (Gabon).

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