Solo 5 – Marcher sans soulever la poussière d’Oscar Martin

Solo 5Marcher sans soulever la poussière d’Oscar Martin.

Delcourt, collection Contrebande, janvier 2021, 88 pages, 14,95 €, ISBN 978-2-41302-269-5. Solo. Historias Caníbales 5 (2020) est traduit de l’espagnol par Miceal O’Grafia.

Genres : bande dessinée espagnole, science-fiction.

Oscar Martin naît en 1962 à Barcelone (Espagne). Il est dessinateur, scénariste et coloriste depuis 1983 : Tom et Jerry (animation), La Guilde (bandes dessinées). Plus d’infos sur son site officiel.

Ça faisait plus d’un an que j’avais lu Solo 1 – Les survivants du chaos, et je n’avais pas pu lire les tomes suivants cette année pour le Mois espagnol (qui a pourtant duré deux mois, mai et juin)… J’ai alors enchaîné le tome 2, Le cœur et le sang, le tome 3, Le monde cannibale, le tome 4, Legatus et heureusement que j’avais ce tome 5 !

Le topo. Sur une Terre post-apocalyptique, ravagée par les produits chimiques et les armes nucléaires vivent de gros prédateurs aux allures préhistoriques, des humains parfois mutants ou hybrides et des animaux géants ou plus ou moins dégénérés, des rats, des félins, des singes, des chiens, des cochons, des lapins avec des fusils (comment ça, mais non, ce n’est pas ma faute si vous pensez à une certaine chanson !)…

Legatus est parti apporter son message de paix et d’union ailleurs mais il a laissé derrière lui des êtres convaincus par de belles valeurs et qui agrandissent toujours plus la communauté des pensants.

Cependant, un militaire déchu et devenu cinglé (ou sûrement l’était-il déjà depuis le début) est devenu gouverneur de la colonie centrale des humains et appelle ses généraux à la destruction des communautés libérées. « Allons-y avec toutes nos forces, une colonie rebelle après l’autre, et soumettons-les ! Reprenons la main sur le territoire. Reformons l’armée grâce à un recrutement forcé. Ou tu es avec nous ou tu meurs ! » (p. 25). Belle mentalité face au message pacifique porté par Legatus et ses ‘disciples’…

En tout cas, dans le monde vert qui a recueilli Legatus, des lapins, des chats et d’autres animaux herbivores vivent en harmonie mais ils sont entourés par des carnivores et ils ne savent pas encore que les humains ont décidé de les détruire, leur but étant de « [vivre] dans un seul et même monde mais qu’il faut savoir regarder, apprendre et gérer avec sagesse. » (p. 64).

Un beau tome plein de surprises ! Et j’espère qu’un tome 6 arrivera bientôt puisqu’il est stipulé à la fin « fin du volume 2 de la trilogie » donc Solo tomes 1, 2, 3 représentent une première trilogie et Solo tomes 4, 5, 6 représentent une deuxième trilogie. Les tomes 4 et 5 sont très bons mais plus courts que les précédents… Cependant j’apprends qu’il y a deux autres tomes, des spin off : Solo – Chemins tracés d’Oscar Martin (au scénario) et Alvaro Iglésias (au dessin) dont l’héroïne est Fortuna, une chatte (parution chez Delcourt en mars 2019) et Solo Alphas d’Oscar Martin (au scénario) et Juan Alvarez (au dessin) avec des chiens (parution chez Delcourt en janvier 2022), une bonne nouvelle et j’espère que la bibliothèque les a !

Le lecteur ne peut qu’adhérer au message délivré par les êtres pacifiques. En fin de volume, des fiches techniques sur ce qui s’est passé « après la Fin », au sud le monde cannibale désertique et violent (première trilogie donc), au nord le monde vert en fait appelé Corindon (deuxième trilogie donc) et comment les herbivores ont évolué sereinement et agrandi leurs territoires grâce aux travailleurs de force (gros herbivores comme les hippopotames), aux forgerons et charpentiers (des castors et des tortues), aux navigateurs qui allaient d’île en île pour planter des graines et déposer de petites colonies (lapins…), aux soldats pour se protéger des cannibales (des rhinocéros) et aux messagers (des chevaux), bref un développement bien plus équitable et profitable que celui des humains. Qui en avait douté ?

Pour La BD de la semaine (plus de BD de la semaine chez Fanny) et les challenges BD 2022 et Littérature de l’imaginaire #10.

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Solo 4 – Legatus d’Oscar Martin

Solo 4 – Legatus d’Oscar Martin.

Delcourt, collection Contrebande, janvier 2019, 80 pages, 14,95 €, ISBN 978-2-41300-921-4. Solo. Historias Caníbales 4 (2018) est traduit de l’espagnol par Miceal O’Grafia, Yannick Lejeune et Anaïs Zeiliger.

Genres : bande dessinée espagnole, science-fiction.

Oscar Martin naît en 1962 à Barcelone (Espagne). Il est dessinateur, scénariste et coloriste depuis 1983 : Tom et Jerry (animation), La Guilde (bandes dessinées). Plus d’infos sur son site officiel.

Ça faisait plus d’un an que j’avais lu Solo 1 – Les survivants du chaos, et je n’avais pas pu lire les tomes suivants pour le Mois espagnol (qui avait pourtant duré deux mois, mai et juin)… J’ai alors enchaîné le tome 2, Le cœur et le sang, le tome 3, Le monde cannibale, ce tome 4 et heureusement j’ai le tome 5 Marcher sans soulever de poussière (2020).

Le topo. Sur une Terre post-apocalyptique, ravagée par les produits chimiques et les armes nucléaires vivent de gros prédateurs aux allures préhistoriques, des humains parfois mutants ou hybrides et des animaux géants ou plus ou moins dégénérés, des rats, des patauds, des félins, des singes, des chiens…

Si on voit le chien, Alpha, adopté par Solo, renommé Legatus, sur la couverture (ma préférée de la série), c’est qu’il y a une raison, vous vous en doutez. Legatus, donc, rencontre un ours, en fin de vie. Celui-ci lui raconte son histoire et lui offre deux cadeaux, peut-être que ce ne sont pas des cadeaux en fait mais des malédictions… Après avoir détruit le premier cadeau, Legatus reprend la route mais « N’y a-t-il aucune autre alternative que tuer pour vivre ? N’y a-t-il aucune autre façon de traverser cette existence absurde et misérable ? Des questions et encore des questions… » (p. 17).

Sur le chemin, Legatus va agir différemment, il va observer (comme le faisait l’ours), il va apprendre et comprendre parce que « Apprendre n’est pas suffisant, c’est comprendre qui compte. » (p. 21, ma phrase préférée). Il va se lier avec des créatures qui respectent des valeurs souvent oubliées dans ce monde post-apocalyptique et cannibale, l’empathie, la miséricorde, la générosité, le respect, l’honnêteté, la sensibilité… et tous ces êtres si différents les uns des autres vont former une équipe hétéroclite et soudée (magnifique dessin pleine page p. 28).

Mais Legatus ne veut pas être un leader qui fait des miracles, il veut que chacun soit leader et convainc les autres, ceux qui ont les mêmes sentiments et les mêmes valeurs mais ne s’en sont pas encore rendu compte ou ne savent pas comment les exploiter. « Créez une armée de pensants capable de montrer aux autres une façon différente de partager la vie et de comprendre la mort. N’ayez pas peur du combat, n’ayez pas peur de mourir tant qu’il y en aura d’autres pour répandre le même message. La raison est de notre côté. » (p. 67).

Un beau tome (plus court) qui prend une autre direction, énergique mais plus philosophique, avec des dessins sensationnels et une fin surprenante. Vite le tome 5 ! Pas de fiches techniques en fin de volume mais une phrase d’Albert Einstein.

Pour les challenges BD 2022 et Littérature de l’imaginaire #10.

Solo 3 – Le monde cannibale d’Oscar Martin

Solo 3 – Le monde cannibale d’Oscar Martin.

Delcourt, collection Contrebande, octobre 2017, 128 pages, 16,95 €, ISBN 978-2-41300-156-0. Solo. Historias Caníbales 3 (2017) est traduit de l’espagnol par Miceal O’Grafia, Yannick Lejeune et Anaïs Zeiliger.

Genres : bande dessinée espagnole, science-fiction.

Oscar Martin naît en 1962 à Barcelone (Espagne). Il est dessinateur, scénariste et coloriste depuis 1983 : Tom et Jerry (animation), La Guilde (bandes dessinées). Plus d’infos sur son site officiel.

Ça faisait plus d’un an que j’avais lu Solo 1 – Les survivants du chaos, et je n’avais pas pu lire les tomes suivants pour le Mois espagnol (qui avait pourtant duré deux mois, mai et juin)… J’ai enchaîné le tome 3 après le tome 2, Le cœur et le sang, pour rester dans l’ambiance.

Le topo. Sur une Terre post-apocalyptique, ravagée par les produits chimiques et les armes nucléaires vivent de gros prédateurs aux allures préhistoriques, des humains parfois mutants ou hybrides et des animaux géants ou plus ou moins dégénérés, des rats, des patauds, des félins, des singes, des chiens…

Solo rentre de la chasse bredouille… Il ne retrouve pas sa famille et il est attaqué par des singes. « Nous assurons juste l’arrière-garde de la patrouille qui… qui… qui a emmené tes enfants et ta femme. Mais je ne sais ni pourquoi ni où ils les ont conduits. Nous suivons juste les ordres des humains. » (p. 8).

Solo n’a plus qu’à courir, pour retrouver sa famille, vers le sud, là où se sont regroupés les humains, et il se retrouve confronté à toutes sortes de dangers. Il court, de façon « toujours plus intense » (p. 20) et, en même temps, il se dit que par le passé il devait y avoir des arbres, de la verdure, de belles choses à la place de ce désert sec et dangereux.

Mais il est attaqué par des chiens (il me semble que c’est la première fois qu’on en voit). Bizarrement ils ne le tuent pas mais le font prisonnier. En fait, leur chef veut lui parler. « La population humaine augmente de manière incontrôlable et ils vont avoir besoin d’une réserve de nourriture constante et sans risque. Leur solution, c’est l’élevage d’animaux en captivité, destinés à la consommation de masse. J’aimerais que vous, les rats, puissiez résoudre ce problème. Après vous, à qui le tour ? Qui peut le savoir ? » (p. 30). Sage raisonnement mais que peut faire Solo seul ? Pourtant il arrive à libérer quelques rates mais pas sa femme et ses enfants… « Quelle est cette force qui nous pousse à nous accrocher à la vie alors même que nous voulons mourir ? » (p. 55).

Plus loin, alors qu’il meurt de faim, il sauve un chiot rescapé d’une tuerie ; peut-être qu’à deux ils seront plus forts. Le chiot est tout petit et Solo l’appelle Alpha. Il va grandir et Solo va lui apprendre tout ce qu’il sait sur le monde extérieur, les différentes espèces et le combat incessant pour survivre.

Une grande bande dessinée sur la survie et la liberté. « La liberté. Dans un monde comme celui-ci, soumis à la dictature de la faim, à la domination, de la mort… Où peut-être la liberté ? » (p. 99). Peut-être dans le fait de sauver un tout jeune chiot plutôt que le tuer et le manger ? J’aime bien cette amitié avec Alpha, alors que rat et chien sont deux espèces ennemies dans ce monde post-apocalyptique mais le chef des chiens a parlé à Solo et lui a laissé une chance alors c’est bien que Solo ait fait de même avec ce chiot tout mignon, devenu un grand gaillard mais… inexpérimenté donc constamment encore plus en danger sans Solo. De leur côté, les humains font n’importe quoi (ce qui n’est pas une surprise), ils ont asservi les singes qu’ils considèrent comme des sous-humains et ils asservissent les rats pour la nourriture, ensuite à qui le tour comme disait le chien à Solo. C’est très rythmé, ça va à toute allure même, pas de temps à perdre si Solo veut sauver les siens (et le plus possible de rates).

Encore un très beau tome, des dessins superbes, une amitié, de l’émotion et bien sûr de l’action. En fin de volume, des fiches techniques concernant les solitaires, les brutes et les habitants de l’obscurité. Heureusement que j’ai le tome 4 Legatus (2018) et le tome 5 Marcher sans soulever de poussière (2020).

Pour La BD de la semaine (cependant toujours en vacances) et les challenges BD 2022 et Littérature de l’imaginaire #10.

Solo 2 – Le cœur et le sang d’Oscar Martin

Solo 2 – Le cœur et le sang d’Oscar Martin.

Delcourt, collection Contrebande, janvier 2016, 112 pages, 16,95 €, ISBN 978-2-75607-192-3. Solo. Historias Caníbales 2 (2015) est traduit de l’espagnol par Miceal O’Grafia, Yannick Lejeune et Anaïs Zeiliger.

Genres : bande dessinée espagnole, science-fiction.

Oscar Martin naît en 1962 à Barcelone (Espagne). Il est dessinateur, scénariste et coloriste depuis 1983 : Tom et Jerry (animation), La Guilde (bandes dessinées). Plus d’infos sur son site officiel.

Ça fait plus d’un an que j’ai lu le premier tome, Solo 1 – Les survivants du chaos, et je n’ai pas pu lire les tomes suivants pour le Mois espagnol (en mai et qui a pourtant continué en juin)…

Je remets le topo que j’avais écrit pour le premier tome. Sur une Terre post-apocalyptique, ravagée par les produits chimiques et les armes nucléaires vivent de gros prédateurs aux allures préhistoriques, des humains parfois mutants ou hybrides et des animaux géants ou plus ou moins dégénérés, des rats, des patauds, des félins, des singes…

Après s’être libéré des combats de l’arène, Solo s’est réfugié dans une communauté où il vit heureux avec Lyra, une jolie rate blanche. Mais un groupe de réfugiés arrive et, parmi eux, Grand, l’ami d’enfance de Lyra. Jaloux, Solo s’en va. « J’emporte avec moi un amour fatigué et étourdi, dévoré par l’anxiété… J’emporte avec moi un amour confus et triste, à naufrager sur l’horizon. […] » (p. 24), très poétique Solo. « Je reprends la route. » (p. 25). Le dessin pleine page est splendide : « Solitude noire, solitude féroce, solitude cruelle… brûlante solitude. » (p. 26).

Il y a une ville avec des humains (apparemment normaux) et ils ont besoin de nourriture… Leur projet est d’enlever une centaines de rates jeunes et saines et quelques mâles sous contrôle pour la reproduction et donc la nourriture. Est-ce là qu’Alba, enlevée par des singes, a été conduite ?

Mais revenons à Solo qui brave tous les dangers de jour comme de nuit. Il rencontre un autre rat, son frère Bravo, qu’il ne reconnaît que lorsque celui-ci l’emmène jusqu’au lieu où il habite avec leur père devenu vieux. Après l’attaque de leur village par des chats noirs, ils étaient les deux seuls survivants (ils étaient à la chasse) et depuis ils sont devenus nomades. Après quelques jours passés à partager les souvenirs et à chasser, le père convainc Solo de retourner auprès de Lyra alors que lui et Bravo continueront leur route. Mais, horreur, le village est détruit, les morts sont mangés par des charognards agressifs et les autres ont sûrement été enlevés. Solo est de nouveau seul… avec le regret d’avoir abandonné Lyra. Il reprend la route mais… « À chaque pas, la vie nous réserve des surprises. » (p. 63).

Un très beau tome avec des dessins extraordinaires, de l’action et des sentiments. Je l’ai trouvé philosophique avec à la fois de la violence (les personnages sont dans un monde post-apocalyptique où il faut se battre pour survivre, manger ou être mangé) et de la poésie. Finalement, les rats sont les seuls être qui vivent à peu près normalement, ils vivent en communauté, ils font des petits raisonnablement, ils chassent pour se nourrir et se protéger, ils se soutiennent et s’entraident, et Solo personnage principal y fait pour beaucoup.

Solo est une histoire de chair, de sang, de survie et d’amour. Je vais lire la suite puisque j’ai pour l’instant le tome 3 Le monde cannibale (2017), le tome 4 Legatus (2018) et le tome 5 Marcher sans soulever de poussière (2020).

Comme pour le premier tome, il y a en fin de volume, des fiches techniques avec des explications sur les différentes espèces (sauriens et amazones que je n’ai pas l’impression d’avoir vus, chats, humains, crétins et dégénérés avec des illustrations) puis 3 histoires courtes inédites dont une préquelle au tome 1.

Toujours une excellente bande dessinée (histoire, dessins, couleurs) que je mets dans les challenges BD 2022, Littérature de l’imaginaire #10, et aussi dans Challenge lecture 2022 (catégorie 5, un roman avec le mot sang dans le titre, c’est une bande dessinée mais qui contient plus de 100 pages chacune et la série se lit comme un roman).

Gentlemind 2 de Díaz Canales, Valero et Lapone

Gentlemind 2 de Díaz Canales, Valero et Lapone.

Dargaud, février 2022, 72 pages, 18 €, ISBN 978-2-20508-724-6.

Genre : bande dessinée espagnole.

Juan Díaz Canales est le scénariste. Il naît en 1972 à Madrid (Espagne). Après avoir étudié l’animation, il devient scénariste et dessinateur de bandes dessinées. Du même auteur : Blacksad et Corto Maltese entre autres.

Teresa Valero est la co-scénariste. Elle naît le 23 juillet 1969 à Madrid (Espagne). Elle travaille pour le dessin d’animation (Corto Maltese, Nanook parmi les séries animées et Astérix et les Vikings, Bécassine parmi les films d’animation) puis se tourne vers le scénario de bandes dessinées. Du même auteur : Sorcelleries (3 tomes).

Antonio Lapone est le dessinateur et le coloriste. Il naît le 24 octobre 1970 à Turin (Italie). Après avoir été dessinateur pour une agence de publicité, il se lance dans la bande dessinée. Il vit en Belgique. Plus d’infos sur son blog, Lapone Art.

Lorsque j’ai lu Gentlemind 1, je ne pensais pas mettre si longtemps pour lire le tome 2… mais, voilà, c’est chose faite ! Le premier tome se déroulait entre 1939 et 1944 et le lecteur faisait la connaissance principalement d’Arch Parker (dessinateur), Navit (son amie), H.W. Powell (riche industriel, propriétaire du magazine Gentlemind), Waldo Trigo (avocat portoricain) et sa sœur Gabriela (activiste).

Brooklyn, New York, 1945, Navit devenue Gina Powell (dans le 1er tome) a hérité de Gentlemind à la mort de son époux mais ça ne plaît pas à l’équipe de rédaction (que des hommes) et Arch est quelque part en Europe (en train de se battre… ou mort…).

Gina veut absolument moderniser le vieillissant Gentlemind pour en faire un magazine moderne avec de la fiction. Mais elle ne veut pas faire comme la concurrence, Esquire qui mise sur l’érotisme et Amazing Stories qui mise sur l’imaginaire (en particulier la science-fiction et le fantastique).

Juin 1945, John Doe doit écrire une histoire de fiction pour chaque numéro mais Robert Hearn du New York Times dévoile que John Doe est en fait l’avocat Waldo Trigo, or il est Portoricain et des échauffourées ont lieu entre les Portoricains qui manifestent et la police…

Décembre 1945, Gina a réussi son coup avec « Homme de papier, la nouvelle fiction américaine, Capote, Faulkner, Steinbeck, Hemingway, Fitzgerald, Chandler, Salinger, Camus, Bradbury » (p. 12), excusez du peu ! À noter que Camus, Français né en Algérie, est assimilé à cette « nouvelle fiction américaine ».

Juin 1947, le magazine est en plein essor et publie Gus Greene, Joe Clayton, Ira B. Philips, C.C. Fuse, Carson Ravitch, Arthur McVoy, Bruce Enoch, Alexander Foxton, des noms que, je l’avoue, je connais moins que ceux cités plus haut.

Août 1949, Gina est blessée lorsqu’elle voit un numéro spécial d’Esquire proposant « une anthologie des plus belles pin-up d’Arch Parker ». (p. 14). Pendant ce temps-là, les Portoricains continuent de manifester pour leurs droits.

Juin 1950, Gentlemind titre « Vous les hommes êtes tous égaux. » (p. 15). Mais les manifestants portoricains ont été arrêtés par la police et Gabriela, blessée par balle, est à l’hôpital. Robert Hearn rend visite à Waldo Trigo en prison et veut lui faire dire une opinion politique. « Il n’y a pas de patrie, Hearn. Il y a des hommes qui écrasent d’autres hommes et des hommes qui se défendent, c’est tout. J’embrasserai cette cause, mais je ne ferai mienne aucune langue, aucune terre. Et la seule arme que je compte utiliser pour cela, c’est l’écriture. » (p. 19).

D’autres histoires se rajoutent à celle de Gentlemind comme celle de Jo, la nouvelle secrétaire, ou celle de Maggie Kenwood, la photographe, amie du docteur Karl Penrod Wolf, le chirurgien des stars. Et, en mars 1951, Robert Hearn qui a quitté The New York Times et Maggie Kenwood sont en Une, quant à Jo, elle est devenue rédacteur en chef.

Les ventes de Gentlemind ont augmenté de 30 %, les annonceurs publicitaires sont revenus à 60 % mais rien n’est gagné, un nouveau concurrent arrive en 1953. « Votre Esquire, votre Gentlemind… – Non, non, donnez-moi ce Playboy dont tout le monde parle. » (p. 37). Gentlemind survit grâce aux Unes avec Charlie Chaplin ou Elvis et au retour d’Arch Parker mais fin des années 60, début des années 70, d’autres magazines paraissent comme Mad, People, Rolling Stone et plus personne ne veut de Gentlemind, « une revue vieillotte » (p. 53).

Un récit riche en émotion et rebondissements qui, à travers les 30 ans de parution de Gentlemind (jusqu’en 1975), raconte la vie aux États-Unis, la vie des Américains, des ‘presque’ Américains (des réfugiés allemands, parfois d’anciens nazis sur qui retombe leur passé), des ‘pas encore’ Américains (les Portoricains qui ont continué la lutte). Le tout dirigé par une femme qui malheureusement s’endurcira et se perdra… Une très belle suite (et fin) enrichissante et bien menée.

Pour La BD de la semaine (plus de BD de la semaine chez Noukette) et les challenges BD 2022, Mois espagnol et sud-américain et Les textes courts.

Les quatre fils d’Ève de Vicente Blasco Ibáñez

Les quatre fils d’Ève de Vicente Blasco Ibáñez.

La Revue de Paris, 1922, 45 pages (lecture numérique). Los cuatro hijos de Eva (1921) est traduit de l’espagnol par Georges Hérelle.

Genres : littérature espagnole, novella, classique.

Vicente Blasco Ibáñez naît le 29 janvier 1867 à Valence (Espagne). Il étudie le droit dès 1882 et publie son premier texte dans une revue de Valence puis, à Madrid, il fonde le journal fédéraliste La Revolución en 1887 et publie Fantasías (son premier livre). Écrivain, journaliste et homme politique, il est considéré comme l’un des plus grands romanciers de langue espagnole (avec ses romans de style naturaliste, il est comparé à Émile Zola). Il fonde le blasquisme (mouvement idéologique populiste et républicain, anticlérical et qui appelle à l’insurrection) et le journal El Pueblo en 1894. Il publie de nombreux romans entre 1892 et 1929 (plusieurs sont adaptés au cinéma) et il est invité pour des conférences en Europe et en Amérique (en particulier en Argentine et aux États-Unis). Il s’exile en France en 1925 et meurt à Menton (France) le 28 janvier 1928.

Durant l’hiver en Europe, des migrants, des Espagnols et des Italiens pour la plupart, partent moissonner chaque année en Argentine. Malgré le prix du voyage, ils gagnent plus là-bas (6 pesos par jour) que dans leur pays (quelques centimes). Les propriétaires argentins [les] appellent ‘hirondelles’ » (p. 3). Le tio (oncle) Correa, un Espagnol qui travaille en Argentine depuis trente ans, est « l’oracle des moissonneurs espagnols » (p. 4), un patriarche respecté mais ce jour-là, un homme avait eu le bras broyé et il resterait handicapé à vie. Alors Correa se lamente et se plaint…

« Le mal est sans remède. Il y aura toujours des riches et des pauvres, et ceux qui sont nés pour servir les autres doivent se résigner à leur triste sort. Ma grand’mère le disait bien, et pourtant elle était une femme : c’est la faute d’Ève s’il n’y a pas d’égalité dans le monde ; et nous, qui passons rageusement notre vie à servir et à engraisser les autres, c’est la première femme que nous devons maudire pour la servitude à laquelle elle nous a condamnés. Mais quel est le mal qui n’a point pour cause les femmes ? » (p. 6). Il faut bien un(e) coupable quelle que soit l’époque…

Mais pourquoi Ève ? Remontons à l’époque où Adam et Ève sont « chassés du Paradis terrestre et condamnés à gagner leur pain à la sueur de leur front » (p. 7) et comprenons bien qu’en fait c’est Adam qui a tout fait, tout inventé, tout construit, tout travaillé ! Quant à Ève, elle mettait « au monde un enfant tous les ans, quelquefois deux, ― elle ne pouvait pas s’en dispenser, puisqu’elle avait la mission de peupler la terre, ― elle demeurait toujours aussi jolie. » (p. 10). Oui, vous avez bien lu ! Pourquoi je lis ça, moi ? Bon, c’est pour la bonne cause, grand auteur espagnol, classique, tout ça…

Alors qu’Adam est « le travailleur infatigable, le bon procréateur » (p. 11), Ève est parfois « injuste et agressive » (p. 10), surtout elle est une coquette, fantaisiste et ambitieuse qui délaisse ses enfants et devient vaniteuse… Euh, c’est plus que de l’anticléricalisme de la part de l’auteur, là, c’est de la misogynie pure et dure ! Y aurait-il quelque chose que je ne comprends pas dans cette histoire ? Bon, continuons…

Bref, un jour, un chérubin prévient Ève que, s’il ne pleut pas, le Créateur viendra leur rendre visite sur Terre. C’est pourquoi elle choisit, parmi la centaine d’enfants, ses quatre préférés « et elle les débarbouilla, les habilla le mieux qu’elle put. Puis, avec force bourrades, elle poussa tous les autres dans une étable et les y enferma sous clef, malgré leurs protestations. » (p. 23). Arrivent l’escorte, les archanges et le Seigneur avec les anges et les hauts dignitaires de la cour céleste… Le Seigneur ne veut pas revenir sur la punition qu’il a infligée à Adam et Ève mais il considère que leurs enfants sont innocents donc il veut leur faire un cadeau à chacun mais… « Quatre enfants seulement ? ― s’étonna le Seigneur. ― Je vous croyais une descendance plus nombreuse. Mes cadeaux ne me ruineront pas. Allons, petits, approchez. » (p. 27).

Je ne vous dis pas le cadeau que reçoit chacun des quatre fils, oui Ève a choisi quatre fils, aucune fille… Lisez ce conte presque biblique qui vous éclairera indubitablement sur « l’absurde logique par laquelle l’humanité se laisse conduire » (p. 33) puisqu’un tout petit nombre dirige (en plus quatre n’est pas un très bon chiffre dans certains pays du monde) alors que les autres sont enfermés dans l’étable comme un troupeau honteux qu’on doit cacher… Le monde est finalement une « éternelle tragédie » (p. 36) et je comprends où le vieux Correa voulait en venir au niveau social et humain même si j’ai un peu de mal avec ce non-humour cinglant. Mais, résolument à lire, à découvrir !

Avez-vous déjà lu cet auteur espagnol ? Si oui, quel(s) titre(s) ? Je me laisserais bien tenter (un de ces jours) par le roman Les quatre cavaliers de l’Apocalypse (Los cuatro jinetes del Apocalipsis, 1916). En tout cas, vous pouvez lire Les quatre fils d’Ève sur plusieurs sites en numérique et sur Wikisource en espagnol.

Après L’œuf de cristal de H.G. Wells, un auteur anglais, hier, je continue le tour d’Europe, thème de mai de Les classiques c’est fantastique avec cet auteur espagnol que je ne connaissais pas et je mets aussi cette lecture dans 2022 en classiques, Mois espagnol et sud-américain, Petit Bac 2022 (catégorie Famille pour Fils) et Les textes courts.

Orient de José Carlos Llop

Orient de José Carlos Llop.

Chambon (Actes Sud), janvier 2022, 224 pages, 21,80 €, ISBN 978-2-330-16123-1. Oriente (2019) est traduit de l’espagnol par Edmond Raillard.

Genres : littérature espagnole, roman.

José Carlos Llop naît en 1956 à Palma de Majorque, une île des Baléares (Espagne). Il gère la bibliothèque Lluís Alemany (patrimoine de Majorque). Il est auteur (romans, poésie, essais, théâtre, nouvelles…) et traducteur. Vous pouvez lire une interview sur le site de Do, l’un de ses éditeurs en français.

« Lorsqu’on est expulsé de soi-même tout en vivant dans un pays inventé – et la passion amoureuse est un pays inventé par le désir –, l’expulsion est double. D’une part, on doit abandonner son propre monde, celui qu’on a construit et par lequel on a été construit. D’autre part, la boussole qui permettait de s’aventurer en terra incognita se dérègle. Pour combien de temps, on ne sait, mais l’avarie perdure dans le nouvel état : l’aiguille aimantée cesse de reconnaître le nord, et le sud disparaît ; et la passion s’affaiblit en perdant sa nature secrète. L’infection du quotidien. » (p. 15).

Pourquoi le narrateur est-il si pessimiste ? « Ma femme m’a mis à la porte. La phrase est vulgaire, mais le fait ne l’est pas. […] Il n’y a pas eu de cris, ni de scène […]. » (p. 16). Il vit « à présent dans un ancien couvent de moines bénédictins transformé en hôtel. » (p. 17). Il n’y a qu’un autre pensionnaire en plus de lui, Cyril Hugues Mauberley, un bibliophile anglais qui fait des recherches sur l’actrice Natacha Rambova et le peintre Federico Beltrán Masses (Majorque). Et puis il a une relation avec Miriam, une de ses étudiantes, et il se lance à corps perdu dans ses recherches sur Sophie Ravoux (juive) et Ernst Jünger (nazi).

Mais il vient d’enterrer sa mère et il découvre dans « une boîte à chaussures qui porte [son] nom […] des lettres que Sara Gorydz a envoyées à [sa] mère il y a vingt ans. » (p. 20). Des lettres mais aussi d’autres documents, des photos et des agendas annotés. Sara Gorydz, juive polonaise, a vécu en Italie avec son mari, l’écrivain Paolo Zava, et elle a travaillé pour le journal Il Gazzettino et pour le musée de Herculanum. Rosa (la mère du narrateur) et Sara ont passé des années ensemble après la Deuxième guerre mondiale.

Le narrateur passe alors en revue ses souvenirs, sa mère (Rosa), son père (Hugo, journaliste), ses grands-parents maternels partis en Guinée (sa mère y est d’ailleurs née), sa femme (Ana), ses recherches sur Ovide, et finalement la quête de l’amour. « Tout cela […], je l’ai écrit pour ne pas parler de moi-même et, ne le faisant pas, le faire quand même. S’écrire à travers les autres […]. » (p. 39). Mais dans une lettre écrite par sa mère, inachevée, il découvre un secret, un secret du temps où ses parents vivaient entre Orient et Occident, « deux façons différentes d’aimer. » (p. 43).

Professeur universitaire, le narrateur se réfère souvent à Ovide, « poète cultivé, ironique et raffiné, vivant au milieu des barbares, loin de Rome et de ceux qui l’avaient applaudi »(p. 18) et à son œuvre. Il y a aussi pas mal de références cinématographiques, avec le réalisateur espagnol Bunuel mais pas que, et des références musicales (p. 115, p. 160). Et il y a plus encore, « Je voulais être écrivain et j’avais un roman, l’histoire de ma famille. […] La volonté d’être écrivain, ou de se croire écrivain, engendre autant de monstres que le sommeil de la raison goyesque. » (p. 73). « Je voulais être écrivain et j’étais convaincu que l’histoire de ma famille serait un grand roman. » (p. 75).

Un roman sensuel qui parle d’amour, de désir, de passion, d’excitation, de sexualité, de désordre amoureux ou d’harmonie, de « la prodigieuse complexité de l’amour » (p. 88), un roman riche (histoire, littérature, cinéma, peinture, musique…), peut-être trop riche… J’ai moins aimé les pages 151 à 198, j’ai trouvé que ça tournait un peu en rond, mais les dernières pages sont très bien. Je lirai d’autres titres de José Carlos Llop (si vous en avez un à me conseiller !).

Mon passage préféré. « Dans l’imaginaire de toute vie se cache toujours la fuite, la disparition, l’invention d’une autre vie différente. Toujours. Et la consolation se trouve dans le cinéma, dans les chansons, dans les romans… Mais ce n’est qu’une consolation et nous le savons. » (p. 117).

Pour Challenge lecture 2022 (catégorie 33, un livre qui parle d’un secret de famille), Petit Bac 2022 (catégorie Lieu pour Orient), Le tour du monde en 80 livres (Espagne), Voisins Voisines 2022 (Espagne) et bien sûr le Mois espagnol.

Clivages de Sylvain Runberg et Joan Urgell

Clivages de Sylvain Runberg et Joan Urgell.

Hachette BD, label Robinson, février 2020, 120 pages, 24,95 €, ISBN 978-2-01707-630-8.

Genres : bande dessinée belge et espagnole, Histoire.

Sylvain Runberg naît le 1er janvier 1971 à Tournai en Belgique (sa mère est Belge et son père est Français) mais il grandit dans le sud de la France. Il étudie les arts plastiques dans le Vaucluse puis l’histoire contemporaine à Aix en Provence. Il travaille d’abord en librairie puis devient scénariste de bandes dessinées (Humanoïdes Associés, Dupuis, Lombard). Du même auteur : Astrid (2004), Les chemins de Vadstena (2009), Millenium (2013, adaptation du roman), Le règne (2017) entre autres.

Joan Urgell naît le 10 septembre 1982 en Catalogne (Espagne). Il dessine depuis l’enfance et étudie à l’école Joso à Barcelone puis se lance dans le design et enfin la bande dessinée. Du même auteur : La onzième plaie (2008), Dead life (2011).

Juliana Brovic a 32 ans, elle est médecin ; l’éditeur dit « quelque part en Europe » (les Balkans ?). Elle est mariée à Vitaly et le couple a deux filles, Jelena et Irene. Juliana soigne une vieille dame lorsque des chars et des camions « légitimistes » arrivent dans leur petite ville de Pernissi qui est « du côté des patriotes » (p. 9).

Sur la Grand Place. « Je suis le colonel André Mélok… J’ai l’honneur d’être à la tête du 28e Régiment des forces armées de notre pays. Depuis deux ans, notre nation est défigurée par une guerre civile déclenchée par des traîtres qui osent se définir comme des ‘patriotes’… Ces terroristes tentent depuis de diviser le pays par la violence, en contestant notre démocratie. […] » (p. 13).

C’est la guerre… Et les militaires s’installent. Mais, un ado de 15 ans qui joue au foot, Denis, saute sur une mine et Juliana ne peut rien faire pour le sauver…

Encore un thème difficile abordé en bande dessinée, celui de la guerre, et plus précisément de la guerre civile. Qui a tort, qui a raison, les patriotes / terroristes (cela dépend dans quel camp on est), les militaires ? Peu importe, il y a des assaillants, des assaillis, des salauds des deux côtés et surtout il y a toujours des victimes collatérales parmi la population. Les dessins, les décors (la petite ville, la forêt) sont très beaux, ce qui permet de supporter cette vision d’horreur (la guerre, la destruction, les morts) et de prendre plaisir à lire cette bande dessinée.

Pour La BD de la semaine, Bingo littéraire d’Hylyirio (n° 18, un livre qui se passe dans la forêt ou dans la montagne, eh bien ça tombe bien, cette histoire se déroule dans une petite ville de montagne avec de la forêt), Challenge lecture 2022 (catégorie 14, un livre sur le thème de l’armée) et Des histoires et des bulles (catégorie 50, une BD qui se déroule pendant une guerre, 2e billet). Plus de BD de la semaine chez Stéphie.

Solo 1 – Les survivants du chaos d’Oscar Martin

Solo 1 – Les survivants du chaos d’Oscar Martin.

Delcourt, collection Contrebande, septembre 2014, 128 pages, 16,95 €, ISBN 978-2-75604-170-4. Solo. Historias Caníbales 1 (2012) est traduit de l’espagnol par Miceal O’Grafia, Yannick Lejeune et Anaïs Zeiliger.

Genres : bande dessinée espagnole, science-fiction.

Oscar Martin naît en 1962 à Barcelone (Espagne). Il est dessinateur, scénariste et coloriste (ici avec Diana Linares) depuis 1983 : Tom et Jerry (animation), La Guilde (bandes dessinées). Plus d’infos sur son site officiel.

Sur une Terre post-apocalyptique, ravagée par les produits chimiques et les armes nucléaires vivent de gros prédateurs aux allures préhistoriques, des humains du genre mutants ou hybrides et des animaux géants. Des rats, des patauds, des chats noirs… Apparemment il y a aussi des chiens et des singes mais ils n’apparaissent pas dans ce premier tome.

C’est l’hiver, il fait très froid. « Il est difficile de survivre dans ce milieu si hostile. Les ressources sont maigres et tes frères grandissent si vite que… » (p. 11).

Solo est un rat, il est l’aîné et a tout appris avec son père mais il doit maintenant « tracer [sa] propre route » (p. 11).

L’hiver est rude, se battre et manger ou être mangé… Au printemps, Solo est enlevé et obligé de se battre dans une arène. « La mort en spectacle. Comme si devoir tuer pour se nourrir n’était pas un châtiment suffisant. » (p. 46).

La série Solo est une histoire de chair, d’os et de sang. Solo retrouvera-t-il sa liberté ? Et aussi restera-t-il en vie ? Ce premier tome est vraiment violent mais il m’a donné très envie de lire la suite. Pour l’instant la série contient 4 tomes de plus : Le cœur et le sang (2016), Le monde cannibale (2017), Legatus (2019) et Marcher sans soulever de poussière (2021). Tomes 2 et 3 empruntés à la médiathèque, tomes 4 et 5 réservés.

En fin de volume, des fiches techniques, des explications sur les différentes espèces (rats, mustélidés, humains, nocturnes, porcs, singes, chiens…) et des illustrations supplémentaires.

Une excellente bande dessinée tant au niveau de l’histoire que des dessins et des couleurs que je mets dans La BD de la semaine et les challenges BD, Des histoires et des bulles (catégorie 9, une BD de SFFF) et Littérature de l’imaginaire #9. Plus de BD de la semaine chez Stéphie.

Bartleby le scribe de José-Luis Munuera

Bartleby le scribe de José-Luis Munuera.

Dargaud, Hors collection, février 2021, 72 pages, 15,99 €, ISBN 978-2-50508-618-5.

Genres : bande dessinée espagnole, adaptation d’un classique états-unien.

José-Luis Munuera naît le 21 avril 1972 à Lorca dans la région de Murcie (Espagne). Il étudie les Beaux-Arts à Grenade. Il est fan d’Astérix, de Spirou et Fantasio et aime le dessin humoristique. Du même auteur : Les Potamoks avec Joann Sfar, Merlin avec Joann Sfar puis Jean-David Morvan, Sir Pyle S. Culape avec Jean-David Morvan, Nävis avec Jean-David Morvan et Philippe Buchet, Spirou et Fantasio avec Jean-David Morvan, Les Campbell, Zorglub… Il est scénariste et dessinateur. Son blog n’est plus mis à jour depuis octobre 2007.

Cette bande dessinée sera en librairie le 19 février et je remercie NetGalley et Dargaud de m’avoir permis de la lire en avant-première.

Wall Street, New York City, fin du XIXe siècle (extrait, p. 28, ci-contre). Dans cette ville de murs de plus en plus hauts, les humains, semblants tout petits, vaquent à leurs occupations et travaillent. Bartleby est embauché en renfort de Turkey et Nippers dans un office notarial et son patron en est content. « Au début, Bartleby réalisait un nombre considérable d’écritures. Il semblait insatiable comme s’il avait été longtemps affamé de copies. Il les avalait l’une après l’autre, travaillant jour et nuit, sans relâche. » (p. 22).

Mais, lorsque le notaire lui demande de collationner et vérifier les copies, Bartleby répond « Je préférerais ne pas le faire. » (p. 24) et comme le patron insiste, Bartleby insiste aussi « Je préférerais pas. » (p. 25 et suivantes). Le jeune homme travailleur, appliqué, soigneux qui refuse de sortir du cadre de son travail devient « une menace » (p. 30) cependant le notaire fait avec car il reste satisfait de son travail.

Pourtant, un dimanche, en allant à son bureau, le notaire se rend compte que Bartleby s’y est enfermé. « Ma parole ! Cet homme mange, dort et s’habille dans mon étude ! Il vit ici ! » (p. 37). Et le notaire se pose des questions. « Dans quelle misère, dans quel isolement vit Bartleby, unique spectateur de sa propre solitude ? Qui est Bartleby ? Qu’est Bartleby ? » (p. 38). La situation devient surréaliste. Plus surprenant, Bartleby décide du jour au lendemain de ne plus travailler ! Le notaire, pourtant patient, est alors contraint de le renvoyer mais Bartleby refuse de partir, en fait il ne préférerait pas !

Bartleby le scribe, l’énigmatique, est une profonde réflexion sur la conscience, le devoir et la possibilité de « la désobéissance civile » (p. 45), de la fuite possible en tant que lutte contre l’État et le capitalisme. Les dessins de Munuera sont vertigineux et l’humain ne peut que chercher sa place dans cette immensité qui le dépasse, son utilité dans une nouvelle société moderne en pleine expansion.

Bartleby a été adapté plusieurs fois au cinéma, au théâtre et a inspiré des artistes (au cinéma et en littérature), des sociologues et des philosophes. Cette bande dessinée est une très belle adaptation de Bartleby, the Scrivener: A Story of Wall Street (1853) de Herman Melville (1819-1891) que je vais lire en mars pour une lecture commune avec Noctenbule (j’ai hâte maintenant !).

« I would prefer not to » dans la version originale, « je préférerais ne pas », comme une parole positive mais avec une possible négation… Je vous laisse compulser ce qu’en ont pensé les philosophes du XXe siècle, Deleuze et Derrida en tête.

Pour La BD de la semaine et les challenges BD, 2021, cette année sera classique et Les textes courts. Plus de BD de la semaine chez Stéphie.