Boys Run The Riot 2 de Keito Gaku

Boys Run The Riot 2 de Keito Gaku.

Akata, collection Medium, mai 2022, 224 pages, 8,05 €, ISBN 978-2-38212-263-3. Boys Run the Riot Vol. 2 ボーイズ・ラン・ザ・ライオット (2020) est traduit du japonais par Blanche Delaborde.

Genres : manga, seinen.

Keito Gaku 学慶人 est un mangaka transgenre. Boys Run The Riot est sa première série manga et aucune autre info n’est disponible sur internet. Cependant, il peut être suivi sur son Instagram et son Twitter.

Quel plaisir de retrouver Ryo, Sato et Itsuka (voir Boys Run The Riot 1 de Keito Gaku). Par contre leur premier tee-shirt ne s’est pour l’instant vendu qu’en trois exemplaires… Pour créer un deuxième design et une deuxième série de tee-shirt, ils décident chacun de trouver un petit boulot.

Ryo trouve un poste dans un restaurant et fait la connaissance de Mizuki Momose (qu’on peut voir sur la couverture à ses côtés) et qui, selon Ryo, « est carrément insupportable » mais qui est étudiante en art et qui l’accepte tel qu’il est. Il y a aussi Shimada, fan de moto, et Koike, leurs collègues, euh… un peu lourds…

Un jour, Sato emmène Ryo et Itsuka chez Tsubasa, youtubeur surnommé Wing (un million d’abonnés, passage à la télévision) qui va devenir leur premier collaborateur extérieur. Et Ryo va de surprise en surprise ! « Comment tu veux que les autres te comprennent si tu te caches ? ».

D’ailleurs, choc à la fin du tome, mais deux pages pour annoncer le tome 3 et un bonus de 4 pages avec des explications sur le genre et la traduction ; hâte de lire le tome 3 !

Un plaisir cette série tant au niveau des dessins que des dialogues et de l’humour. Une série à mettre entre toutes les mains (ados, adultes) !

Pour La BD de la semaine (plus de BD de la semaine chez Noukette) et les challenges BD 2023 et Jeunesse & young adult #12.

Rooster Fighter – Coq de baston 2 de Shu Sakuratani

Rooster Fighter – Coq de baston 2 de Shu Sakuratani.

Mangetsu, collection Shônen, juillet 2022, 192 pages, 7,90 €, ISBN 978-2-38281-086-6. Rooster Fighter volume 2 (2021) オンドリの戦闘機 ニワトリ・ファイター (Niwatori Fighter) est traduit du japonais par Alexandre Fournier.

Genres : manga, shônen, science-fiction, fantastique, horreur.15

Shu Sakuratani 桜谷シュウ naît… eh bien quelque part au Japon (aucune info) et il est mangaka. Son premier manga T-Dragon (ヒーローズコミックス 10 tomes entre 2015 et 2019) n’est pas traduit en français. Plus d’infos (et plein de dessins de coqs) sur son compte twitter et son instagram.

Keiji, le coq aux supers pouvoirs, continue son combat contre les kijûs, « Cocori-K-O ! », talonné par la poussinette amoureuse de lui. Mais comment une énorme limace peut-elle être immortelle ? « Impossible… J’ai pourtant tué les autres en visant leur tête ou leur cœur… Il a forcément un point faible. »

Les scènes de combat sont spectaculaires et il y a beaucoup d’humour : qu’est-ce qui est le plus dangereux, un kijû ou… Elizabeth jalouse ?!!! Combat redoutable !

Malheureusement, les kijûs étaient auparavant rouges ou bleus et n’étaient pas très intelligents mais Elizabeth a remarqué que des kijûs mutants de toutes les couleurs arrivaient, « Ils possèdent des émotions et une intelligence proches de celles des humains… ainsi que leur propre caractère » (p. 78).

Keiji n’est plus seul, la poussinette (finalement nommée Piyoko) et Elizabeth seront sûrement utiles pour lutter contre ces kijûs mutants et contre l’immense kijû blanc. Mais en attendant, besoin de se rétablir et de se reposer alors un bon bain aux sources chaudes, ça vous dit ?

Après la lecture du tome 1, j’avais hâte de lire la suite mais j’ai dû attendre que les tomes arrivent (à la médiathèque). Un tome 2 très énergique, avec des dessins toujours très beaux et un ton humoristique – au milieu de toute cette horreur – qui me plaît bien. L’auteur continue de montrer la nature humaine et la possibilité que nous soyons des monstres au fond de nous sans même le savoir ou plutôt sans vouloir se l’avouer.

J’aime beaucoup Keiji mais Piyoko est peut-être mon personnage préféré (tellement mignonne). Je ne vais pas attendre trop longtemps pour retrouver le trio de choc puisque j’ai les tomes 3 et 4, ouf !

Pour La BD de la semaine (plus de BD de la semaine chez Fanny), BD 2023 et Challenge lecture 2023 (catégorie 7, un livre qui fait rire), Contes et légendes #5, Jeunesse & young adult #12, Littérature de l’imaginaire #11, Petit Bac 2023 (catégorie Animal pour Rooster / Coq) et Un genre par mois (en mars, young adult).

Adabana 1 de Non

Adabana 1 de Non.

Kana, collection Big Kana, avril 2022, 196 pages, 12,90 €, ISBN 978-2-50511-380-5. Adabana vol. 1 (2020) est traduit du japonais par Sophie Lucas.

Genres : manga, seinen.

Non naît le 26 janvier 1987 au Japon. Avant Adabana, Delivery Cinderella (11 tomes entre 2010 et 2012, comédie érotique) et Harem Marriage ou Hare-kon (19 tomes entre 2014 et 2019, romance érotique). Harem Marriage Seconds! paraît en 2022. Hare-kon est annoncé pour 2023 par ONO (une nouvelle maison d’éditions). La suivre sur Instagram et sur Twitter.

Une petite ville de campagne, tranquille et enneigée. Mako Igarashi, une lycéenne de 17 ans, a été tuée et Mizuki Aikawa, sa meilleure amie (même âge, même lycée), va se dénoncer au commissariat avec l’arme du crime, un couteau, et se dénonce également pour un autre meurtre.

Bien sûr le lecteur sait le pourquoi du comment mais… je ne peux et ne veux rien vous dire !

Placée en détention, Mizuki refuse l’aide de l’avocat commis d’office mais « N’importe quel accusé a droit à un procès juste et équitable. Mon rôle est de me mettre à votre place et de vous aider à vous défendre, et ce quelque soit la sévérité du crime que vous avez potentiellement commis. »

Adabana est un manga de genre seinen (pour adultes), vraiment très bien dessiné et avec une histoire prenante, dense, intense. Qu’est-ce qui peut pousser quelqu’un (quel qu’il soit) à tuer ? Et pire encore, sa meilleure amie, sa seule amie ? Et les protagonistes, en particulier Mizuki Aikawa et Yûki Akatsuki, disent-ils la vérité ? Attention, manga violent ! Alors que les dessins sont très beaux avec cette édition grand format ! On sent l’ambiguïté et j’ai hâte de lire la suite d’autant plus qu’Adabana est une série en 3 tomes (terminée au Japon). Parfait !

Pour La BD de la semaine (plus de BD de la semaine chez Stéphie) et les challenges BD 2023, Bingo littéraire d’Hylyirio (case n° 3, un thriller psychologique), Challenge lecture 2023 (catégorie 27, un livre publié sous pseudonyme), Les dames en noir (thriller d’une autrice dessinatrice japonaise) et Polar et thriller 2022-2023.

Boys Run The Riot 1 de Keito Gaku

Boys Run The Riot 1 de Keito Gaku.

Akata, collection Medium, mars 2022, 224 pages, 8,05 €, ISBN 978-2-38212-242-0. Boys Run the Riot Vol. 1 ボーイズ・ラン・ザ・ライオット (2020) est traduit du japonais par Blanche Delaborde.

Genres : manga, seinen.

Keito Gaku 学慶人 est un mangaka transgenre, c’est son premier manga et aucune autre info n’est disponible sur internet. Cependant, il peut être suivi sur son Instagram et son Twitter.

Ryoko Watari est une fille mais elle se sent garçon et déteste l’uniforme féminin alors il se fait appeler Ryo et essaie de venir au lycée en jogging mais il est souvent rappelé à l’ordre.

Ce jour-là, un nouvel élève arrive dans leur classe, Jin Sato. « Normalement il devrait être en troisième année mais il a été longtemps absent. ». Les cheveux longs attachés en petit chignon, un look de loubard mais classe, Ryo est à la fois interloqué et fasciné.

Cependant certains lycéens se doutent de quelque chose concernant Ryo alors il doit faire profil bas même si ce n’est pas facile pour lui car ce qu’il aime ce sont les vêtements masculins. C’est justement dans une boutique spécialisée qu’il croise le nouveau, Jin, et le lendemain celui-ci lui propose de créer une marque de vêtements avec lui (puisqu’ils ont les mêmes goûts). « Ce type… comment dire… Il est bizarre, c’est sûr… Mais en même temps… ».

Sous l’influence et la compassion de Jin, Ryo va prendre confiance en lui, peu à peu, et réussir à s’affirmer, du moins à commencer de s’affirmer. « C’est quand on ignore la honte qu’on est le plus fort ! » et il crée le premier design mais il faudrait de belles photos pour la boutique en ligne…

C’est là qu’entre en jeu Itsuka Todo « Président du Club de photo du lycée… dont je suis le seul membre… ». Bref, un incompris comme eux.

Ryo est considéré comme une anomalie mais il se considère lui-même comme une anomalie. Ce n’est pas facile de s’accepter mais ne pas s’accepter, c’est laisser la porte ouverte à ceux qui n’accepteront pas non plus. Lorsqu’il s’ouvre à Jin, il a sûrement fait un premier pas même si ça lui a coûté. L’auteur, lui, raconte sans fard cette histoire de transidentité avec de beaux personnages et c’est parfait parce qu’il n’y a pas qu’au Japon que des gens se sentent enfermés dans des cases et veulent en sortir pour vivre leur vraie vie. Je remercie Sharon de m’avoir fait découvrir ce manga.

Message pour ceux qui en ont marre des « séries de lycéens », Boys Run The Riot est différente, au-dessus du lot, et pas seulement par le thème abordé, elle vous plaira c’est sûr et elle est complète en 4 tomes. De mon côté j’ai hâte de lire la suite parce que c’est super bien dessiné (univers Street et mode), énergique et drôle, et parce que je veux savoir jusqu’où Ryo et Jin, et Itsuka aussi, iront !

Pour La BD de la semaine (plus de BD de la semaine chez Moka) et les challenges BD 2023, Bingo littéraire d’Hylyirio (case n° 19, un livre qui se passe sur une île, ici le Japon), Challenge lecture 2023 (catégorie 37, un livre dont le titre ne contient pas la lettre A, 2e billet), Jeunesse & young adult #12, Un genre par mois (toujours drame en février).

Romance d’Outre-Tombe de Natsuki Sumeragi

Romance d’Outre-Tombe de Natsuki Sumeragi.

Delcourt / Akata (plus au catalogue), avril 2007, 192 pages, 7,95 €, ISBN 978-2-7560-0311-5. Ryôsanpaku to Shukeidai (Kadokawa Shôten, 1992) est traduit du japonais par Yuki Kakiichi et adapté par Laurence Gillet.

Genres : manga, seinen.

Natsuki Sumeragi 皇名月 (ou 皇なつき pour signer ses mangas) naît le 21 août 1967 à Ôsaka au Japon. Elle étudie la littérature japonaise à l’Université de Ritsumeikan à Kyôto. Elle est passionnée par la Chine et la Corée et ses dessins sont extraordinaires par rapport au contexte historique et culturel (kimonos, décors…). J’ai ses autres titres, La voix des fleurs (花情曲 ou はなのこえ, Hana no koe, 1991), Intrigues au pays du matin calme (李朝・暗行記 ou りちょうあんぎょうき, Richô Angyouki, 1993), Pékin années folles (燕京伶人抄, Peking reijin shô, 1995) et Un destin clément (恋泉 花情曲余話, Rensen Hana no koe yowa, 1998), ce qui est dommage c’est qu’ils n’existent plus chez l’éditeur… Plus d’infos sur son blog (plus mis à jour).

L’histoire du temple Shuzen – d’après L’histoire du temple Shuzen de Kidô Okamoto (1872-1939), auteur de Fantômes et samouraïs – Hanshichi mène l’enquête à Edo, entre autres. Fin du XIIe siècle, des combats sanglants éclatent entre les samouraïs. Katsura et Kaede, deux sœurs, filles du sculpteur Yashaô d’Izu, se chamaillent. Kaede a épousé l’artisan qui seconde son père mais Katsura rêve d’un mariage avec un noble. C’est à ce moment-là qu’arrive le Shogun Yori-ié Minamoto, 23 ans : il a commandé un masque en bois à Yashaô mais celui-ci tarde à arriver… « J’ai sculpté sans relâche mais jusqu’à présent les résultats n’ont pas été satisfaisants… […] Un masque demande plus que de la technique ! Il s’agit d’y mettre de l’âme ! » (p. 13). Katsura, sous le charme du noble accepte d’être à son service mais… Celui-ci est tourmenté, il a peur de la mort. Katsura et Yori-ié pourront-ils s’aimer ? « Je ne pensais pas que les personnes de haut rang souffraient autant. » (p. 44). Ce conte japonais est une belle histoire d’amour tragique, inspirée de faits (plus ou moins) réels puisque le masque est devenu le trésor du temple Shuzen.

L’ogre de Sôzudono – « Grand frère, tout le monde sait qu’un ogre habite Sôzudono, ce n’est pas une plaisanterie ! » (p. 72). Le grand-frère réprimande Munechika, quelle idée pour un jeune homme de croire ce genre d’absurdités ! Mais il est embarqué un peu à l’insu de son plein gré par Munechika et ils vont tous deux à Sôzudono… pour y trouver leur destin. Une histoire d’amour, de jalousie et de haine entre deux frères, l’aîné ayant plus de droits (et de devoirs) que son jeune frère (et, à notre époque, rien n’a changé, rien de nouveau sous le soleil comme on dit).

Romance d’Outre-Tombe – d’après La romance de Liang Shanbo et Zhu Yingtai (梁山伯与祝英台, en pinyin liáng shānbó yŭ zhù yīngtái, parfois traduit par Les amants papillons, du fait de la traduction anglaise Butterfly Lovers). Cette légende chinoise est un genre de Roméo et Juliette antique, présentée au classement de l’UNESCO dans l’objectif d’entrer à son répertoire du patrimoine oral et immatériel en 2006 (source Wikipédia). Ying-tai, 16 ans, ne va pas bien mais le médecin dit qu’elle n’a aucun problème de santé. Un ‘devin réputé’ dit à son père qu’elle devrait aller à Hang-zhou. « Si vous la laissez partir, elle échappera à un destin tragique. » (p. 100). Le père accepte – un de ses vieux amis, He Tian-you, y tient une école – mais Ying-tai doit absolument revenir au bout d’un an et personne ne doit découvrir son identité. Elle se fait alors passer pour un homme et part avec sa servante, Yin-xin, qu’elle fait passer pour sa jeune sœur qui l’accompagne. Dans une auberge, elle rencontre un beau jeune homme – qui l’intimide – et ils font route ensemble. « Qui sont ces deux-là ? – Ah, eux deux ! Ce sont Liang Shan-bo et Zhu Ying-tai. Ils sont arrivés en même temps à l’école de Maître He l’année dernière. Il paraît qu’ils se sont rencontrés pendant leur voyage et ont sympathisé, depuis ils sont inséparables comme des frères. » (p. 109). Mais l’année est passée et Maître He oblige Ying-tai à rentrer, or son père veut la marier… Une très belle histoire d’amour, romantique et… tragique bien sûr.

En fin de volume, un Livre des merveilles du monde regroupe une postface illustrée de la mangaka et des clés de compréhension sur le Japon et la Chine antiques et médiévales. Les trois histoires sont évidemment dramatiques : il y a Outre-Tombe dans le titre, ce qui veut tout dire mais elles sont agréables à lire non seulement grâce aux superbes dessins de Natsuki Sumeragi mais aussi grâce aux textes épurés, centrés sur le nécessaire pour le format court et avec une pointe de fantastique. À découvrir assurément !

Pour La BD de la semaine spéciale Bulles d’amour (plus de BD de la semaine chez Fanny) et les challenges 2023 en classiques, ABC illimité (lettre R pour titre), BD 2023, Bingo littéraire d’Hylyirio (case n° 2, une BD ou un manga, 4e billet), Challenge lecture 2023 (catégorie 30, une BD qui est l’adaptation d’un roman), Contes et légendes #5, Jeunesse & young adult #12, Littérature de l’imaginaire #11, Un genre par mois (en février, du rire aux larmes, amour et drame).

Des oiseaux de Paolo Pellegrin

Des oiseaux de Paolo Pellegrin.

Atelier EXB, collection Des oiseaux, octobre 2021, 104 pages, 35 €, ISBN 978-2-36511-312-0.

Genres : beau livre, photographies.

Paolo Pellegrin naît le 11 mars à Rome en Italie. Il étudie à l’Institut de photographie de Rome. Il est photojournaliste à l’internationale. Ses œuvres sont présentées dans plusieurs expositions et publications et il reçoit plusieurs prix. Plus d’infos sur Magnum Photos.

Ce très beau livre est le 11e tome de la collection Des oiseaux. Il contient 44 photographies en noir et blanc. Le texte (en fin de volume) est de Guilhem Lesaffre. Il existe en version française et en version anglaise, et aussi en version illimitée sous coffret [ici].

Je l’ai consulté trois fois pour bien m’imprégner des photographies. J’aime les rapaces et j’ai visité une partie de cette forêt mais je n’ai pas vu ces milans noirs (tobi en japonais)… Peut-être que je n’ai pas assez levé la tête ou que ce n’était pas la bonne saison pour les voir…

À Kyoto, le Shimogamo (temple Shimo) est situé au nord du delta de la rivière Kamo (Kamo-gawa en japonais, ce qui signifie rivière aux canards) et il se dresse au cœur de la Tadasu no Mori (ce qui signifie forêt de la vérité). Ce sanctuaire shintô a été construit au VIIe siècle dans une forêt primaire peuplée de milans noirs.

« Planant haut dans le ciel, tombant soudainement à pic, virevoltant avec puissance toutes ailes déployées avant de surgir parmi les frondaisons, les milans exécutent avec maestria un joyeux ballet choral. L’objectif tourné vers la pureté abstraite de l’azur, Paolo Pellegrin a saisi leur fulgurante vitesse dans des cadrages serrés : les oiseaux semblent jaillir du cadre ou en sortir à toute allure. Rémiges effilées, serres en position aérodynamique pour mieux filer dans l’espace, silhouettes souples et fuselées : les chorégraphies se succèdent, en soliste, en duo ou en groupe. Les milans noirs glissent dans les airs, opèrent des loopings, dessinent des figures acrobatiques. Ils se détachent sur des ciels aux noirs et blancs saturés, nous fixent, nous défient, nous surprennent. Leur majesté force l’admiration. Leurs rémiges se font doigts, leurs ailes deviennent capes. Défiant les lois de la pesanteur, immergés dans les profondeurs des sous-bois, les oiseaux de Pellegrin nous invitent à pénétrer dans un monde mystérieux et fantomatique, où seule règne la présence animale. »

Pour ABC illimité (lettre D pour titre), Bingo littéraire d’Hylyirio (case n° 14, le nom d’un animal dans le titre, 2e billet), Challenge lecture 2023 (catégorie 57, un livre documentaire) et Petit Bac 2023 (catégorie Animal pour Oiseaux).

The Sound of my Soul 1 de Rin Saitô

The Sound of my Soul 1 de Rin Saitô.

Akata, septembre 2022, 176 pages, 6,99 €, ISBN 978-2-38212-407-5. Suisho no hibiki vol.1 (2019) est traduit du japonais par Alexandre Goy.

Genres : manga, shôjo.

Rin Saitô 斉藤 倫 naît un 2 mai dans la préfecture d’Aichi au Japon et elle vit à Tokyo où elle est mangaka depuis 1981 (ses œuvres sont prépubliées dans le magazine Margaret et publiées chez Shûeisha). Plus d’infos sur sa page FB et sur son compte twitter.

Ce manga est « un récit fictionnel basé sur la vie de Mizuki Shikimachi, un véritable violoniste en chair et en os » qui joue depuis l’âge de 4 ans et que la mangaka a rencontré sur scène lorsqu’il avait 16 ans.

« Mon cerveau est spécial. Il a quelque chose bien à lui. Il m’a été transmis par ma mère… un don, obtenu d’une force supérieure bienveillante. Je peux changer tout ce qui existe en ce monde… grâce à la musique. Les vibrations émises par les cordes du violon résonnent dans mon âme. Je les chéris comme un trésor… avant des les laisser se répandre dans le cœur de mon audience. ».

En participant à une audition, Mizuki a reçu des membres du jury 422 points, « le plus haut score jamais atteint » par un enfant, mais rebutés par son handicap, une paralysie cérébrale, ils attribuent le prix à la candidate arrivée deuxième, une fillette de huit ans, qui a plus de chance d’avoir « une bonne condition physique » pour réussir comme grand talent de demain…

La mère de Mizuki, Keiko Shikimachi, est mécontente mais son meilleur ami, Natsuki, le soutient car, bien que malentendant, sa musique le touche au cœur. Mizuki et Natsuki se sont rencontrés un an auparavant dans une classe spécialisée, Le ciel azuré, alors que Natsuki dansait.

Mizuki a attisé la curiosité du célèbre violoniste et professeur Toshihiro Nakayoshi qui normalement ne prend plus d’élève mais qui décide de se déplacer chez lui. « M. Nakayoshi m’écoute parler… sans même chercher à m’interrompre. – Si tu tiens à toucher un maximum de personnes, le classique fera très bien l’affaire. Pourquoi m’avoir sollicité ? – Parce que… pour la première fois, je me suis dit ‘Je veux ressembler à ce violoniste !’ – Tu veux devenir comme moi ? – Oui. Je veux apprendre à faire vibrer l’air environnant avec mon corps tout entier. » Contrairement à ce que Mizuki pensait, le professeur Nakayoshi lui apprend le rythme et le tempo.

Quant à son arrivée au collège, ça ne se passe pas très bien, les élèves le surnommant « le handicapé »… mais Mizuki – qui a maintenant 11 ans – préfère ne rien dire à sa mère. Il se montre même motivé et enjoué mais tiendra-t-il le coup ?

En fin de volume, il y a une histoire genre préquelle (écrite et dessinée en 2018) sur les débuts de Mizuki, un récit documentaire intitulé The Sound of Crystal. Un beau récit qui raconte l’accouchement prématuré, le choix du prénom Mizuki « avec les caractères du cristal de roche, une pierre solide et brillante », la défection du père, Nao, en apprenant que son fils aurait un handicap, les grands-parents maternels qui s’occupent du nourrisson pendant que sa mère travaille et qui sont témoins de son don : l’oreille musicale, les premiers problèmes et l’arrivée du handicap à l’âge de 3 ans, sa mère qui s’est toujours battue pour lui : « Ça va aller… Il est encore tout à fait capable de se déplacer. Il mange bien… parle tout le temps… et rit beaucoup… Tout se passera bien. » et enfin la découverte du violon. « Mais… par la suite, de nouvelles maladies sont apparues, avec leur lot de difficultés. » C’est très beau et inspirant parce que peu de personnes – valides ou handicapées – ont l’envie et la force de se battre comme ça !

Ce manga est pour tous les lecteurs, il montre les difficultés du handicap et l’incompréhension voire la méchanceté des ‘valides’ qui réagissent par du ‘validisme’. Il permet aux lecteurs de relativiser et de mieux comprendre, et ce message n’est pas de trop parce que, trop souvent, l’empathie et la sympathie sont remplacées par la moquerie. J’ai hâte de lire la suite mais, en attendant, j’ai fait quelques recherches.

Définition Wikipédia : « Le capacitisme ou validisme est une oppression pouvant prendre la forme de discrimination, de préjugé ou de traitement défavorable contre les personnes vivant un handicap (paraplégie, tétraplégie, amputation, malformation mais aussi dyspraxie, schizophrénie, troubles psychiques, autisme, trisomie, etc.). Le système de valeurs capacitiste, fortement influencé par le domaine de la médecine, place la personne valide, sans handicap, comme la norme sociale. Les personnes non conformes à cette norme doivent, ou tenter de s’y conformer, ou se trouver en une situation inférieure, moralement et matériellement, aux personnes valides. Dans ce système de valeurs et de pouvoir, le handicap est ainsi perçu comme une erreur, un manque ou un échec et non comme une conséquence des événements de la vie ou de la diversité au sein de l’humanité. La Convention relative aux droits des personnes handicapées définit l’absence d’accommodement raisonnable en faveur de personnes non valides comme une discrimination fondée sur le handicap. »

Mizuki Shikimachi 式町水晶 naît en octobre 1996 à Asahikawa sur l’île de Hokkaido mais il grandit à Kawaguchi dans la préfecture de Saitama (chez ses grands-parents maternels). Malgré son handicap, il devient un célèbre violoniste : il joue le 5 septembre 2021 à la cérémonie de clôture des Jeux paralympiques de Tôkyô 2020, reportés en 2021. Il passe plusieurs fois à la télévision et enregistre 3 albums. Plus d’infos sur son site officiel (peu de choses), son instagram, son twitter et quelques titres à écouter sur Soundcloud. Et ci-dessous deux vidéos sur King Records.

Pour La BD de la semaine (plus de BD de la semaine chez Noukette) et les challenges BD 2023, Bingo littéraire d’Hylyirio (case n° 2, une BD ou un manga), Challenge lecture 2023 (catégorie 37, le titre ne comporte pas la lettre A mais il aurait pu aller dans la catégorie 54), Jeunesse & young adult #12, Un genre par mois (en janvier, ‘bulles’, BD, manga…).

Mermaid Saga Intégrale 1 de Rumiko Takahashi

Mermaid Saga Intégrale 1 de Rumiko Takahashi.

Glénat, collection Seinen, octobre 2021, 400 pages, 14,95 €, ISBN 978-2-34404-792-7. 人魚シリーズ (Ningyo Shirîzu, 1985) est traduit du japonais par Nesrine Mezouane.

Genres : manga, shônen/seinen, fantastique.

Rumiko Takahashi 高橋 留美子 naît le 10 octobre 1957 à Niigata (préfecture de Niigata, Japon). Elle commence à dessiner très jeune puis, lorsqu’elle est étudiante à Tokyo, elle fréquente Gekiga Sonjuku, l’école de manga fondée par Kazuo Koike. Elle débute sa carrière avec des recueils amateurs appelés dôjinshi (1975) puis Urusei Yatsura (1978-1987). C’est une mangaka célèbre (au style reconnaissable) et elle a reçu plusieurs prix. J’ai lu ses chefs-d’œuvre, Inu-Yasha, Ranma 1/2, Urusei Yatsura que j’ai également vus en animation, ainsi que Maison Ikkoku (Juliette, je t’aime) en animation. J’ai aussi lu ses one-shots (parus chez Tonkam), La tragédie de P (1994), Le chien de mon patron (1999) et Un bouquet de fleurs rouges (2005). Quant à Mermaid Saga, j’ai vu les OAV et la série animée mais je n’avais jamais lu le manga.

Mermaid Saga est paru au Japon en 3 tomes entre 1984 et 1994, d’abord en prépublication dans Shônen Sunday Zôkan (1984-1985) puis dans Weekly Shônen Sunday (1987-1994) avant d’être édité par Shôgakukan (dès 1985) et adapté en animation (en 1991, 1993 et 2003). Le premier tome, Mermaid Forest 人魚の森 (Ningyo no mori soit la forêt des sirènes) est le seul tome traduit en français en 1998. Le tome 2, Mermaid’s Scar 人魚の傷 (Ningyo no kizu soit la cicatrice de la sirène) et le tome 3, Mermaid Gaze 夜叉の瞳 (Yasha no hitomi soit l’œil du démon) sont enfin traduits en français. Ce premier tome intégrale contient Mermaid Forest.

Yuta a mangé de la chair de sirène et il est devenu immortel (sauf s’il a la tête tranchée) alors que tous ses amis pêcheurs sont morts dans d’atroces souffrances. Il a 20 ans… depuis 500 ans mais souffre de voir tous ceux qu’il aime vieillir et mourir. Il voudrait donc redevenir mortel. « On m’a dit que pour redevenir humain, je devais rencontrer une sirène… ».

Mana a été capturée enfant par des sirènes qui l’ont obligée à manger de la chair de sirène afin, à leur tour, de se nourrir de sa chair pour redevenir jeunes et belles…. Elle a 16 ans, est aussi immortelle, et heureusement a réussi à s’enfuir grâce à Yuta qui est arrivé dans le village isolé où elle était prisonnière, c’est sûr « les sirènes ne savent pas rire ».

Des sirènes, des monstruosités, des pirates, de l’action, de l’aventure, parfait pour un shônen (manga pour garçons) mais il y a quelques scènes violentes et érotiques alors c’est plutôt un seinen (manga pour adultes). Il y a aussi d’horribles vieilles femmes et de l’humour, « Arrête de crier, ton dentier risque de tomber ! » (p. 188), mouah ah ah, elle est bien bonne !

Ce premier tome est un très beau livre, dans un format plus grand que les mangas habituels (145 x 210 mm). Les différentes histoires peuvent être lues indépendamment (comme des nouvelles) mais il y a une certaine continuité chronologique donc mieux vaut les lire dans l’ordre même s’il y a des flashbacks aussi bien pour Yuta que pour Mana. Vous pourrez être un peu énervés par le statut de Mana (jeune fille en détresse avec un héros qui la sauve à chaque fois) mais c’est typique des années 80 (j’appelle ça le syndrome de la Princesse Peach, pour ceux qui connaissent les jeux vidéo… La Princesse Peach se laisse toujours enlever par le méchant Bowser pour que Mario vienne la sauver). Une lecture pour les fans de Rumiko Takahashi et pour ceux qui veulent découvrir la mangaka et son univers. La bibliothèque a acheté le deuxième tome donc je le lirai sûrement dans pas longtemps.

Ils l’ont lu : Aelurus, Floriane, Hervé, Tampopo, d’autres ?

Pour La BD de la semaine (plus de BD de la semaine chez Moka) et les challenges ABC illimité (lettre R pour prénom), BD 2023, Bingo littéraire d’Hylyirio (case n° 14, le nom d’un animal dans le titre, mermaid est l’anglais pour sirène), Challenge lecture 2023 (catégorie 28, un livre sans happy end), Contes et légendes, Jeunesse & young adult #12, Littérature de l’imaginaire #11, Petit Bac 2023 (catégorie Animal pour Mermaid = sirène), Tour du monde en 80 livres (Japon).

Darwin’s incident 1 de Shun Umezawa

Darwin’s incident 1 de Shun Umezawa.

Kana, collection Bik Kana, juillet 2022, 192 pages, 7,55 €, ISBN 978-2-50511-379-9. ダーウィン事変 (Darwin Jihen, 2020) est traduit du japonais par Frédéric Malet.

Genres : manga, seinen, science-fiction.

Shun Umezawa うめざわしゅん naît le 13 décembre 1978 à Kashiwa dans la préfecture de Chiba (Japon). Il est dessinateur, scénariste et il commence sa carrière de mangaka en 1998 avec un one-shot, Jerashi, publié dans le Weekly Young Sunday (Shôgakukan). D’autres titres sont parus avant Darwin’s incident, titre sur lequel il travaille depuis 2020 et prévu en 4 tomes. Shun Umezawa est plus connu en Espagne où ses précédents titres (Utopias, Ippiki to Kyûjûkyûhiki to, Pinkie Always rings Twice, Erehwon) sont traduits. Plus d’infos sur son site officiel.

Voici comment commence ce manga : « Le courant de la conscience s’étend des humains opprimés à tous les animaux, conduisant à de formidables réponses sur l’évolution. Charles Darwin (note griffonnée en février 1838) » (p. 2).

Institut de recherche biologique STRARD à Escondido en Californie. Des membres de l’Alliance de Libération des Animaux « attaquent » et libèrent des singes, des lapins, des chats, des chiens, des souris… et récupèrent une femelle chimpanzé en train de faire une fausse couche.

Institut de recherche sur les primates Kornberg à Saint-Louis dans le Missouri, deux mois plus tard. « Il s’agit du rapport officiel de l’Académie national des sciences. Le décryptage du séquençage de l’ADN et les dernières technologies d’analyse du génome le confirment. Ce nouveau-né… est un hybride mi-humain mi-chimpanzé. C’est un humanzee. » (p. 10-11).

Quinze ans plus tard, à Shrewsville dans le Missouri. Charlie a été adopté et élevé par Hanna et Gilbert (surnommé Bert), un couple composé d’une avocate et d’un scientifique. C’est son premier jour au lycée et… Charlie est considéré comme une bête curieuse (il est connu car il est régulièrement dans les journaux et a même rencontré le président). Mignon pour les uns (plutôt pour les filles), macaque pour d’autres voire danger (plutôt pour les garçons), Charlie n’est pas accueilli à bras ouverts par tous… « Moi, j’ai pas trop envie de m’approcher de lui… On ne sait pas ce que cet hybride pourrait nous faire. » (p. 24), sans commentaire.

Dans la cour, un chat est coincé dans un arbre et Lucy grimpe pour le récupérer mais la branche casse… Charlie est en cours, il saute par la fenêtre et rattrape à la fois le chat et Lucy. Évidemment tout le monde filme la scène. Après ça, à la cafétéria, Lucy et Charlie deviennent amis sous le regards éberlués des lycéens.

Malheureusement des membres plus violents – ou plus cinglés – de l’Alliance de Libération des Animaux organisent des attentats à New York et veulent rallier Charlie à leur cause… Charlie – bien que vivant à plus de 1500 km – est soupçonné de faire partie de ce groupe… « Dis-moi… tu penses vraiment que Charlie pourra devenir l’un des nôtres ? – Nous allons faire en sorte qu’il n’ait pas le choix. » (p. 75).

Au-delà de l’éthique (non, il n’est pas normal que les humains créent des hybrides, des chimères), ce genre d’histoires de science-fiction me plaît bien. Une fois que l’être vivant – ici Charlie – est existant, on ne va pas le tuer quand même mais il ne faut pas oublier qu’il est justement un être vivant sensible, doué de raison, de sentiments, d’émotions et pas qu’un sujet d’études ou d’expériences. Ce manga traite aussi des végans et en particulier de ceux qui commettent des attentats terroristes et tant pis pour les victimes collatérales, ça c’est affreux, on ne défend pas une cause par la violence (et je ne vis pas dans le monde des Bisounours). Quoiqu’il en soit, ce premier tome est une tuerie, je veux dire est vachement bien, enfin vous m’avez comprise, et j’ai hâte de lire la suite ! Le 2e tome est paru en octobre 2022 et le 3e est annoncé pour janvier 2023.

Pour La BD de la semaine (plus de BD de la semaine chez Fanny) et les challenges ABC illimité (lettre U pour nom), BD 2023, Bingo littéraire d’Hylyirio 2023 (case n° 2, une BD ou un manga), Challenge lecture 2023 (catégorie 21, un livre d’un auteur que je n’avais jamais lu), Jeunesse & young adult #12, Littérature de l’imaginaire #11, Petit Bac 2023 (catégorie Prénom pour Darwin, j’ai vérifié Darwin est un prénom provenant du vieil anglais Deorwine qui signifie « cher ami »), Un genre par mois (en janvier, c’est BD, manga…). Certains liens de challenges arrivent !

L’amas ardent de Yamen Manai

L’amas ardent de Yamen Manai.

Elyzad, avril 2017, 240 pages, 19,50 €, ISBN 978-9-97358-092-4. Mais je l’ai lu en poche : J’ai lu, n° 12148, juin 2019, 224 pages, 7,10 €, ISBN 978-2-29016-508-9. Ce titre a reçu 8 prix littéraires

Genres : littérature tunisienne, roman.

Yamen Manai naît le 25 mai 1980 à Tunis (Tunisie) dans une famille cultivée (parents professeurs). Dès l’enfance, il aime la lecture et la poésie. Il étudie les nouvelles technologies de l’information à Paris et écrit en français. Ses romans – qui ont reçu plusieurs prix littéraires – sont considérés comme des contes philosophiques qui amènent les lecteurs à réfléchir (dictatures, fanatismes religieux, écologie). La marche de l’incertitude (2010), La sérénade d’Ibrahim Santos (2011) et Bel abîme (2021) plus rencontre avec l’auteur en octobre 2022.

Alors que des rois riches et puissants s’arrachent le monde (politique, économie, football), le Don, dans un petit village tunisien appelé Nawa, voit ses abeilles bien-aimées mourir… « Ce qui est arrivé n’est pas le fait d’un homme de ce village ni d’une bête des environs » (p. 22). Toute une ruche, « […] trente mille de ses abeilles. Déchiquetées pour la majorité d’entre elles. Trente mille abeilles. Ouvrières. Butineuses. Gardiennes. […] cellules profanées, […] opercules déchirés et les larves arrachées à la chaleur de leurs cocons… Le miel ? Plus une goutte, disparu, comme bu à la paille ! Et au beau milieu du saccage, la reine… Mortellement blessée […] Une colonie complète anéantie et pillée en l’espace de deux heures. Un massacre. » (p. 23).

« Quel mal étrange avait foudroyé la ruche, coupant en deux milliers de ses filles ? » (p. 24). Pour lutter contre le parasite varroa destructor, certains apiculteurs utilisent des pesticides mais le Don, non, il renforce ses ruches grâce à « l’apport de reines sauvages » (p. 45) qu’il part chercher en forêt et en montagne avec son âne, Staka. Mais ce qui est arrivé à ses abeilles, c’est autre chose et il ne sait pas quoi… « C’était la première fois de sa vie d’apiculteur qu’il était confronté à un tel phénomène. » (p. 46).

Lorsqu’il descend au village pour faire des achats, le Don ne reconnaît plus personne ! « À la vue des Nawis, il se frotta les yeux, incrédule. » (p. 58). « Mais où suis-je au juste ? se demanda-t-il. Les femmes étaient de noir nippées de la tête aux pieds, et les hommes qui avaient lâché leur barbe, étaient flanqué de longues tuniques et de coiffes serrées. […] Il courut se réfugier dans l’épicerie. Mais ce n’était pas l’apparence de l’épicière qui allait le rassurer. La bonne femme avait troqué son légendaire foulard rouge aux motifs berbères pour un voile noir satiné qui lui donnait des allures de veuve. » (p. 59). Alors, le Don se rappelle son passé d’apiculteur dans un pays qu’il a fuit, le royaume du Qafar, à cause du fanatisme et de l’hypocrisie…

« Depuis qu’il avait découvert la nouvelle dégaine de ses habitants, le Don descendait au village encore moins souvent que d’habitude. » (p. 107). Surtout, il doit s’occuper de ses nouvelles reines sauvages et veiller au confort de ses ruches. Mais, de nouveau une ruche détruite, le miel dérobé… Que se passe-t-il ? Vous l’aurez compris, c’est un frelon « aux couleurs atypiques et aux proportions gigantesques. » (p. 110).

La mondialisation et les œuvres humanitaires ont des avantages mais, entre le parasite qui arrive d’Europe et le frelon qui arrive d’Asie, c’est beaucoup pour les petites abeilles… En plus, le fanatisme religieux arrive d’Orient… Que peut faire le Don face à ces terroristes agressifs et envahisseurs ? « La nature ne pouvait accoucher d’un tel monstre du jour au lendemain. Ce frelon venait sans doute d’ailleurs. Il avait voyagé. » (p. 119). Le parallèle entre le frelon destructeur et le fanatisme importé est vraiment bien trouvé, une idée de génie !

Lorsque le Don se rend à la capitale pour chercher des informations sur le frelon géant et dangereux, la ville féerique a bien changé… Elle est même « méconnaissable […] triste et crasseuse » (p. 136), partout des barbelés, des poubelles, des blindés de l’armée, des inscriptions révolutionnaires ou religieuses… Et surtout « plus aucun libraire » (p. 137)… Heureusement le Don n’est pas démuni et il va découvrir qui est « vespa mandarinia, ou frelon asiatique géant […] la plus grosse espèce de frelons au monde. » (p. 154), j’en ai aperçu un au Japon et je peux vous dire que je n’en menais pas large mais il est parti dans une autre direction (ouf !). D’ailleurs, en parlant du Japon, « Seules les abeilles japonaises, les apis mellifera japonica, ont réussi à développer une technique de défense efficace, appelée l’amas ardent. » (p. 155). Alors, un voyage au Japon, ça vous plaît ? Un pays qui, comme la Tunisie, est « un savoureux mélange de tradition et de modernité. » (p. 168), je confirme. « Ces deux derniers jours, j’ai vu des costauds faire la queue derrière des gringalets pour rentrer dans des métros et des trains toujours à l’heure, j’ai vu des piétons qui s’arrêtent au feu rouge même à minuit alors qu’il n’y a pas l’ombre d’une voiture. J’ai vu des rues et des parcs étincelants de propreté. Pas un papier ni un mégot de cigarettes par terre. Dans les temples et les jardins zen, l’attention est portée jusqu’aux pétales, rassemblés en petit tas au pied de leurs fleurs. » (p. 181), je voulais noter ces phrases de Tahar parce que c’est ce que j’ai vu au Japon, et tant d’autres choses aussi, les costauds sont les lutteurs de sumô, les gringalets c’est parce que les Japonais sont petits et menus. C’est en fait un de mes passages préférés avec, plus loin, « Le Japon m’a appris sur moi-même plus que je n’ai appris sur lui » (p. 188), bon sang, qu’est-ce que c’est vrai !

L’amas ardent est un roman tragique mais aussi émouvant, tellement. En fait, j’aime bien les romans avec des abeilles, j’avais déjà beaucoup aimé Une histoire des abeilles de Maja Lunde et plus récemment Les abeilles grises d’Andreï Kourkov, si vous avez d’autres titres à me proposer. De plus, Yamen Manai a un humour bien à lui (par exemple, Mino Thor (p. 13), Abdul Ban Ania (p. 16), la bière dans le taxi collectif, les rêves de Jenna…). Et enfin, il y a a les différences et les similitudes entre les cultures tunisienne et japonaise. Tout ça fait de L’amas ardent un roman passionnant, très agréable à lire et un quatrième coup de cœur pour moi (Yamen Manai = 4 romans = 4 coups de cœur = un auteur à lire et à suivre absolument !).

Pour ABC illimité (lettre Y pour prénom), À la découverte de l’Afrique (Tunisie), Bingo littéraire d’Hylyirio (case n° 19, un roman de mon auteur préféré, 3e billet), Tour du monde en 80 livres (Tunisie) et Un genre par mois (en décembre c’est l’amour, l’amour du Don pour ses abeilles, ses filles comme il dit, et l’amour que se portent Jenna et Tahar).