Gros de Sylvain Levey

Gros de Sylvain Levey.

Éditions Théâtrales, septembre 2020, 80 pages, 9,90 €, ISBN 978-2-84260-842-2.

Genres : théâtre contemporain, autobiographie, monologue.

Sylvain Levey naît en 1973 à Maisons-Lafitte dans les Yvelines. Il est comédien de théâtre et auteur (surtout pour les enfants et les adolescents).

La pièce Gros a été créée en octobre 2020 aux Quinconces – Scène nationale du Mans.

« Deux kilos neuf cent quatre-vingts. Deux mille neuf cent quatre-vingt grammes de vie. Né le deux décembre mille neuf cent soixante-treize à deux heures cinquante-cinq. Clinique Sully. Ville de Maisons-Laffitte. Département des Yvelines. France. Europe. » (p. 7). Voici comment commence le monologue de l’auteur né avec « un petit mois d’avance » (p. 7).

Un petit bébé, de moins de 3 kilos et de seulement « quarante-cinq centimètres. Cinq centimètres en dessous de la normale. Je suis petit. Banal et petit. Une crevette. Super pour commencer une vie. » (p. 9)

Un bébé qui va devenir un enfant gros. Mais pas tout de suite parce qu’en fait il n’aime pas manger, il mange très peu. « Je suis à peine plus costaud qu’un poussin au milieu d’un troupeau d’éléphants. » (p. 16), il a 3 ans et le médecin de famille, le docteur Magloire, dit qu’il est « un dépressif chronique et précoce. » (p. 17).

À l’âge de 7 ans, il commence à manger un peu plus. « Mitterrand fait déjà des miracles. » (p. 18) plaisante son oncle. Et deux ans après, « Je n’ai pas eu la sensation, cet été-là, de manger plus que d’habitude. J’avais bon appétit cela faisait plaisir à voir. J’avais bon appétit cela faisait plaisir à mes parents. J’étais heureux de faire plaisir à mes parents alors je mangeais. Tout ou presque tout. » (p. 19). Mais, ensuite, il n’a fait que grossir ! Il n’a plus été surnommé la crevette ou le moustique mais « le petit gros » (p. 20) ou « le petit bouboule » (p. 21) voire « potiron » (p. 21) ou « culbuto » (p. 22).

Il a bientôt 10 ans et son objectif est de perdre du poids parce qu’en juillet 1989, il mesure 1 m 37 et pèse 48 kilos 71 (c’est précis !) mais… « Je n’ai pas perdu un seul du maudit de sa race de petit gramme » (p. 26), logique ! Il se rend bien compte que son alimentation n’est pas idéale mais que peut manger un enfant d’autre que ce que ses parents lui donnent ? Et à l’époque, la cuisine prolétarienne n’était pas très diététique, viandes, frites, ketchup, mayonnaise, pain, beurre, produits industriels, coca cola… « J’ai vingt ans et une quinzaine de kilos en trop. […] un fardeau, un héritage familial […] des petites jambes et un gros bidon. » (p. 30).

Automne 1996, il a arrêté de grandir (1 m 57), pèse 73 kilos 62 (toujours très précis) et n’arrive pas à maigrir… Jusqu’à ce que sa vie change après avoir vu sur une affiche « ATELIER THÉÂTRE » (p. 33), « sur la porte vitrée d’un magasin de pompes funèbres » (p. 33), ça ne s’invente pas ! Depuis, il n’a pas quitté le monde du théâtre et il est heureux avec son épouse et leurs deux enfants (même s’il a peur qu’un jour son cœur lâche comme celui de son père).

Après le monologue, court mais intime, touchant, sincère, intense, Une poignée de secondes Photos de Philippe Malone (p. 45). Une belle leçon de vie à mettre entre toutes les mains, ados et adultes, et surtout si vous avez des grossophobes autour de vous !

Mon passage préféré. « J’écris pour la jeunesse parce qu’elle soigne mon pessimisme […]. Écrire pour la jeunesse c’est œuvrer pour ses propres enfants, pour l’enfant qu’on a été, qu’on aurait aimé être, pour le vieillard qu’on deviendra. Tout le monde devrait écrire pour la jeunesse mais peu sont capable en réalité de le faire. C’est l’endroit du détour, c’est l’occasion de se perdre pour oser mieux se connaître, c’est offrir une fenêtre ouverte dans un monde à l’agonie. » (p. 60).

Pour le Challenge lecture 2021 (catégorie 25, une pièce de théâtre, 3e billet, mais il rentre aussi dans la catégorie 36, un livre basé sur des faits réels), Jeunesse Young Adult #11 (l’auteur écrit pour la jeunesse), Petit Bac 2021 (catégorie Gros mot pour Gros) et Les textes courts.