Quatre soldats d’Hubert Mingarelli.
Seuil, collection Cadre rouge, janvier 2003, 208 pages, 15,20 €, ISBN 978-2-02053-804-6.
Genres : littérature française, roman.
Hubert Mingarelli : lire sa bio sur Une histoire de tempête et sur L’homme qui avait soif (avec photo et hommage).
J’ai tellement de retard dans la publication de mes notes de lectures que j’en publie une un dimanche ! Et j’espère tenir le rythme ces prochaines semaines.
Orphelin, Bénia, le narrateur a quitté Dorovitsa pour Kaliazine où il a travaillé dans une scierie. « J’étais seul dans le monde et le soir je mangeais en regardant le fleuve. Il y avait des bateaux à fond plat qui remontaient le courant. Dans le soleil couchant les coques brillaient. Sur le pont les coques étaient comme des fantômes. » (p. 7-8).
Il a ensuite rejoint l’Armée rouge où il a rencontré Pavel, un gars très astucieux, puis Kyabine, un Ouzbek grand et costaud. Les trois soldats fuient avec leur régiment devant les Roumains puis les Polonais, droit vers l’Est, « notre commandant nous a réunis et nous a dit que nous devions quitter le front, nous replier dans la forêt, construire des cabanes et attendre le printemps. » (p. 13).
Pour construire leur cabane dans la forêt, Bénia, Pavel et Kyabine s’associent avec Sifra Nédatchine, un jeune soldat. « Quant nous avons fini de construire notre cabane, nous l’avons contemplée fièrement dans la lumière du feu qui brûlait au centre de la clairière. Nous en avons fait le tour en nous félicitant, puis nous sommes entrés tous les quatre dedans et j’ai pensé : voilà, j’ai fini d’être seul dans le monde, et j’avais raison. » (p. 15-16).
Les quatre hommes sont inséparables. Mais, un jour, le sergent Ermakov leur impose une toute jeune recrue, Kouzma Evdokim, de Vsevolojsk. « On était silencieux. On était chacun avec nos pensées. Les miennes étaient que le gosse Evdokim ne nous gênait pas beaucoup. En tout cas, pas autant que nous l’avions redouté au début. Quoi que nous fassions il nous suivait et parlait peu. Je savais que nous l’intimidions. » (p. 109).
Ainsi les quatre soldats accueillent Evdokim et lui écrit tout dans son carnet. « Oui, c’est vrai, ça va aller, Kyabine, parce qu’on va tout le temps rester ensemble. De l’entendre dire par Sifra, aussi doucement, ça nous a tous fait du bien. Il y avait si peu de mots qui sortaient de la bouche de Sifra d’habitude que ceux-là avaient porté.. » (p. 159).
Quatre soldats est, malgré la dureté de la vie en temps de guerre, une belle histoire d’amitié et de complicité entre ces quatre hommes vraiment différents mais réunis durant l’automne 1918 et l’hiver 1918-1919, et leur envie de vivre, et même parfois de passer du bon temps (ils jouent aux dés, fument des cigarettes roulées, vont se baigner à l’étang…). Comme les trois mousquetaires étaient quatre, par une prouesse littéraire, les quatre soldats d’Hubert Mingarelli sont cinq mais leur destin n’est pas aussi glorieux que celui des mousquetaires. Il en reste de la nostalgie, de la tristesse… Que sont devenus les personnes qu’on a connues, qu’on a aimées…
Pour Bingo littéraire d’Hylyirio (case n° 20, un livre avec de la neige sur la couverture), Challenge lecture 2023 (catégorie 55, une livre avec une maison sur la couverture), Départements français en lecture (l’auteur est né en Meurthe et Moselle) et Un genre par mois (en novembre, amour ou amitié, ici c’est amitié).